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10/05/2012

Chacun son idéal...

Le 8 janvier. J’ai enfin été « contacté ». J’attendais ça.

A la pause de midi, un ouvrier m’a accosté, avec cette politesse doucereuse et légèrement prétentiarde qui caractérise les sermonneurs, les fanatiques, les prosélytes, les propagandistes, les partisans et autres bons apôtres plus ou moins quêteurs.

« Camarade, m’a-t-il dit, je suis le responsable syndical du block trois.

– Le responsable ? Comme je te plains !

– De quoi ?

– D’être responsable. En cette société il est prudent d’être inconnu, inaperçu, inorganisé et irresponsable.

– Mais, camarade, l’union de tous…

– L’union de tous serait une force si elle ne rassemblait pas les ambitions des uns et la conneries des autres. »

Il est très vexé. Il répond :

«  Mais pour défendre les camarades…

– Tu ne défends personne et ce ne sont pas tes camarades ; tu perds ton temps.

– Mais tous ensemble…

– Où est la foule, il y a les idoles. Mieux vaut le désert, même avec la soif et la brûlure du soleil… »

Cette phrase, dont il ne sait probablement pas qu’elle est de Nietzsche, le désarçonne tellement qu’il oublie de me faire signer la pétition l’inévitable pétition que, de toute façon, je n’aurais pas signée. Il reprend souffle et rétorque, avec l’air cafard et l’exagération qui conviennent :

«  Chacun son idéal.

 

( Henri Vincenot : Les années de colère / Les yeux en face des trous ).

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