30/12/2015
Adresses conseillées : El bloc d'un català identitari
Une petite sélection d'articles (récents), parus sur l'excellent blog de Llorenç Perrié Albanell ( El bloc d'un català identitari, lliure i europeu ), découvert ce matin même et tout nouvellement créé... mais qui ne peut qu'immédiatement retenir l'attention de ceux et celles pour qui les concepts de "racines" et "identités charnelles" ont encore une signification.
A visiter et lire régulièrement !
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CORSE :
La mayonnaise "pas d'amalgame" ne prend pas.
Depuis la victoire des nationalistes corses au soir du second tour des élections régionales, les « pas d’amalgamistes » en prennent pour leur grade. La République jacobine prend la claque identitaire en pleine figure. C’est bien le vote communautaire d’un peuple insoumis qui renvoie le « vivre ensemble républicain » là d’où il n’aurait jamais dû sortir, c’est-à-dire dans les poubelles de l’histoire. En effet la Corse ce n’est pas le continent, Ajaccio ce n’est pas Calais. En quelques heures le peuple corse a réussi à faire ce que les continentaux n’osent plus faire, englués qu’ils sont dans les lois antiracistes, lois en réalité anti-gauloises, anti-européennes. La nuit de Noël deux pompiers et un policier ont été blessés à Ajaccio après être tombés dans une embuscade dans une cité.
Les Corses ont très bien reçu le message du président du SDIS de Corse du Sud, Charles Voglimacci, qui a déclaré dans un communiqué à propos des personnes qui ont agressé les pompiers et policiers : « Ici c’est Ajaccio et nous ne laisserons personne dicter ses propres règles, imposer la peur et s’accaparer un quartier de notre ville. Si cela les indispose, ils sont libres de partir. »
Vous connaissez la suite : plus de six cents personnes se sont réunies le lendemain devant la préfecture pour manifester leur colère. Entre 250 et 300 manifestants sont descendus ensuite dans le quartier en question en scandant « Arabi Fora » (« Arabes Dehors ») et « On est chez nous ». Une mosquée a été attaquée ainsi que la terrasse d’un kebab.
Ce qui différencie le peuple corse de ses cousins européens du continent, c’est cette volonté de conserver intacte la souche communautaire, ainsi qu’une volonté farouche de préserver sa terre de la moisissure qui se répand des zones de non droit jusqu’à la porte de nos foyers. La rue appartient à ceux qui y descendent, les Ajacciens l’ont bien compris. En ce moment même, une poignée d’hommes et de femmes bravent l’interdit préfectoral qui prohibe toute manifestation aux alentours du domicile supposé des malfaiteurs. Nous ne devons pas nous contenter d’être admiratifs devant une telle résistance face à la racaille et à l’Etat, nous devons les imiter. Quant à Gilles Simeoni, nouveau président du Conseil exécutif de la Collectivité Territoriale de Corse, nous ne pouvons que regretter ses prises de position, soucieux qu’il est sans doute de plaire aux gardiens du politiquement correct. Une prise de position en décalage avec son électorat nationaliste qui n’a que faire du fameux « pas d’amalgame ».
Llorenç Perrié Albanell / Perpignan le 27-12-15
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Corse, l’insoumise
Au soir du dernier tour des élections régionales du dimanche 13 décembre, les nationalistes corses ont remporté une victoire historique aux élections territoriales en Corse. La liste « Per a Corsica » (Pour la Corse), issue de la fusion des autonomistes (17,62% au 1er tour) et des indépendantistes (7,73%), a obtenu 35,34% des voix. Il s’agit d’un tournant majeur dans le processus d’autodétermination de l’Ile de Beauté. Évidemment, ces résultats attisent la haine des jacobins de tous bords. Ces derniers, en effet, ne comprennent pas, ne comprendront jamais qu’il puisse exister une autre identité que l’identité administrative : l’identité charnelle.
En Corse, c’est le « vivre corse » qui prime, et non pas le « vivre ensemble », utopie institutionnelle au bord de l’explosion en France. Les Corses ont marqué leur désir de rester eux-mêmes, et c’est tant mieux, ce siècle sera celui du réveil des identités.
Nos jacobins s’offusquent qu’à l’assemblée de Corse on s’exprime en corse, langue vernaculaire jusqu’à preuve du contraire, bien que le discours de son président Jean-Guy Talamoni ait été traduit en français.
Les jacobins ne comprennent pas ou font mine de ne pas comprendre qu’il est mille fois préférable que dans les écoles corses, occitanes, bretonnes ou catalanes, on enseigne la langue du pays, l’histoire locale et les danses traditionnelles à la place de l’arabe dialectal, d’une histoire sélective pour servir des objectifs obscurs, le zouk ou la zumba.
Les jacobins s’indignent et dénoncent un soit-disant complot mondialiste dès lors qu’il s’agit du nationalisme ethnique, alors que le jacobinisme n’est rien d’autre que de la mondialisation au petit pied.
(...)
Llorenç Perrié Albanell / Perpignan le 26-12-15.
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Langues régionales : Le bal des faux-culs
Signée en 1999, depuis 15 ans, la fameuse Charte des langues régionales attend toujours d’être ratifiée. Notre président « normal » avait prévu de le faire lors de la campagne présidentielle de 2012. Aujourd’hui, en difficulté pour les élections régionales, la gauche tente un coup de filet pour capter l’électorat régionaliste. Un coup d’épée dans l’eau pour les apprentis sorciers de l’Élysée ! Leurs adversaires de façade, en ont décidé autrement au Sénat (179 sénateurs) avec l’appui de 9 sénateurs du RDSE (Rassemblement Démocratique et Social Européen) à majorité PRG. Les vieux réseaux jacobino-égalitaristes fonctionnent toujours. Tout est bon pour liquider l’âme des peuples et renforcer la République cosmopolite.
L’argument fumiste mis en avant par la mafia jacobine est le caractère anticonstitutionnel de la Charte. La République ne reconnaît qu’une langue : le français. En revanche, peu d’élus indiquent que cette Charte à un vice caché : la reconnaissance des langues extra-européennes. Ces dispositions mettraient sur un même plan les langues autochtones et des langues allogènes comme l’arabe dialectal. Seuls certains souverainistes ou éléments de l’extrême-droite tricolore ont relevé ce fait de taille. Un argument de poids pour évincer une fois pour toutes le débat sur le sujet.
La gauche s’exprime en faveur de la ratification au travers de Christiane Taubira qui déclare dans l’hémicycle que : « La vraie question est celle de notre conception de la Nation (…) À mes yeux, celle-ci doit être capable de construire de l’harmonie sans étrangler sa diversité ». Inutile de préciser qu’ici nous ne parlons pas de la même « diversité ». Manuel Valls déplore pour sa part : « la surdité de la droite ». L’écologiste François de Rugy tweete : « C’est donc la majorité du Sénat – censée être la chambre des territoires de France – qui a rejeté les langues régionales, non-sens ». Toutes ces déclarations prêtent à sourire, lorsque l’on sait que ces personnalités politiques prônent une société d’êtres hors-sol, sans culture propre et enracinée, au bénéfice de la « soupe universelle ». Le seul intérêt dans l’affaire est électoral.
Les sénateurs de droite ? C’est bonnet-blanc et blanc bonnet. En charge du pouvoir, ils auraient sûrement agit autrement afin de conserver leurs prébendes. Ils seraient allés chercher les votes chez les défenseurs des langues régionales. Mais là n’est pas le fond de la question. C’est leur libéralisme viscéral, leur vision marchande du monde, qui fait qu’ils s’opposent de manière si « républicaine » à la ratification. En effet, toute différence identitaire leur apparaît comme une entrave à la société de marché dont ils rêvent. « Niveler pour mieux vendre » un slogan qui sied parfaitement à leur vision du monde. L’incantation républicaine de la sacro-sainte unité territoriale n’est qu’un prétexte sous leur houlette. En fait, la France n’est plus qu’une colonie américaine administrée depuis Bruxelles (Réintégration dans le commandement intégré de l’OTAN, soumission au diktat de Bruxelles, aucune opposition au Traité-transatlantique, etc.).
Nos souverainistes jacobins rejettent la Charte au motif qu’elle représente un danger car des langues extra-européennes présentes dans l’Hexagone se verraient recevoir les mêmes droits que des langues autochtones, ce qui est anormal, je le concède ou bien encore que ces langues risquent de porter préjudice à l’unité de la France.
Deux points à expliciter (car dans la catégorie des faux-culs ils ne valent pas plus que les autres cités plus haut) :
D’abord ce qui risque de nuire à l’unité de la France ce n’est pas les quelques militants régionalistes, autonomistes, voire indépendantistes qui réclament à juste titre des droits pour leur langue et culture. Si on réfléchit bien, c’est l’intransigeance génocidaire du régime jacobin sur ces questions-là qui fabrique les séparatismes. Il n’y a donc pas de fumée sans feu… C’est la République elle-même qui se met en danger en accueillant un flux incessant et considérable d’immigrés inassimilables de par leur culture et leur vision du monde incompatible avec celle des Européens.
Ensuite, ils invoquent le vice caché de la Charte : la reconnaissance de langues minoritaires extra-européennes. Cette disposition est effectivement une aberration. Il s’agit ici d’un faux pluralisme, non historique, fondé sur un égalitarisme forcené d’idéologues souhaitant transposer leur délire universaliste en universalité juridique. Vouloir mettre sur un pied d’égalité des langues qui ne disposent pas de la légitimité d’un territoire historique, c’est saccager tout un système de valeur. Si toutes les langues disposent d’une légitimité juridique, laquelle alors est encore légitime sur un territoire défini ?
Cette charte comporte des vices ? Pourquoi alors ne pas créer une loi qui viserait à protéger et promouvoir les identités et les langues régionales autochtones ? Nous sortirions peut être d’une impasse et du génocide culturel des peuples enracinés ; un véritable rempart contre ce qu’il convient d’appeler « l’idéologie du même ». La « mêmetée », c’est quand l’égalitarisme atteint son pinacle, c’est-à-dire lorsqu’une société est constituée d’hommes identiques et interchangeables. Comment faire alors face à l’avènement d’une gouvernance mondiale, puisque « tout le monde est tout le monde ». Restent les identités charnelles (opposées aux identités administratives), la lutte de l’homme enraciné contre l’homme déraciné. Cette lutte passe également par la défense et la promotion des langues régionales. Une langue n’est pas seulement l’orthographe ou la grammaire, elle est aussi porteuse d’une philosophie et d’une histoire qui crée la diversité, tout ce que nos ennemis détestent : l’identité.
Llorenç Perrié Albanell, Perpignan, le 6 novembre 2015.
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Articles issus du blog de Llorenç Perrié Albanell
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10:02 Publié dans Blog, Catalunya, Corsica, Histoire de France, Politique / économie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : catalogne, catalunya, corse, corsica, langues régionales, racines, identités, identités charnelles, patries charnelles, france jacobine, jacobinisme, mondialisation au petit pied, colonie américaine administrée depuis bruxelles, france jacobine, jacobinisme, mondialisation au petit pied, colonie américaine administrée depuis bruxelles
09/11/2015
Le Parlement catalan démarre le processus vers l'indépendance...
Le Parlement catalan démarre le processus vers l'indépendance, Rajoy annonce un recours.
RT en français, 09 nov. 2015.
La Catalogne a plusieurs fois manifesté en faveur de l'indépendance.
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Le Parlement indépendantiste de Catalogne a proclamé ce matin le début d'un processus de sécession de l'Espagne, franchissant un nouveau seuil dans la confrontation avec le gouvernement de Madrid. Mariano Rajoy a annoncé un le dépôt d'un recours.
Le Parlement catalan a adopté lundi une résolution qui lance le processus visant à créer une république de Catalogne indépendante de l'Espagne dès 2017.
Les deux partis indépendantistes, qui ont remporté avec 48% des voix la majorité absolue au Parlement catalan lors d'élections régionales le 27 septembre, ont voté une résolution annonçant "solennellement le démarrage du processus de création de l'Etat catalan indépendant" pour 2017.
La résolution, approuvé par 72 voix contre 63, marque une nouvelle étape dans la hausse des tensions entre Barcelone et Madrid, débutée en 2010, lorsque la Cour constitutionnelle avait réduit les compétences reconnues à la Catalogne par un statut d'autonomie que le Parlement national avait approuvé quatre ans plus tôt.
Cette dernière résolution est une des plus fortes mesures de ces dernières années, et prévoit en effet que les élus catalans "ne se soumettront plus aux institutions de l'Etat espagnol, en particulier à la Cour constitutionnelle". Alors qu’ils s’attendent à une annulation de cette résolution par la Cour, les indépendantistes estiment avoir "la force et la légitimité, même si le gouvernement espagnol s'y oppose", a affirmé le député catalan de JxS, Pere Aragonés.
Le gouvernement Rajoy prends des mesures pour éviter l'indépendance.
Malgré ce vote, qui devrait être approuvé sans trop de problème par le Parlement catalan, il y a encore du chemin avant d’imaginer une Catalogne indépendante. Car le texte se heurte à une opposition massive, et d’ores et déjà, avant même un éventuel vote, le gouvernement de Mariano Rajoy a prévenu qu’il ne laisserait pas passer ce nouvel affront. Comme prévu, il a annoncé, suite à au vote de cette résolution, un recours. Ce sera à la Cour constitutionnelle d'éventuellement prononcer l'annulation de cette résolution.
A l'inverse, le chef du gouvernement espagnol s'est déjà assuré de l'appui du parti socialiste (PSOE), son rival traditionnel, et du parti de centre-droit Ciudadanos, farouchement anti-indépendantiste. Le parti Podemos, de son côté, a refusé de suivre et souhaite que la Catalogne se prononce sur son avenir par un référendum, qui n’est pas prévu par la constitution espagnole.
Pour limiter la contagion de la fièvre indépendantiste des élus catalans, les conservateurs ont fait passer au Parlement une réforme de la Cour constitutionnelle qui lui permet de démettre de leurs fonctions les dirigeants qui ignorent ses décisions. Carme Forcadell, présidente du Parlement catalan pourrait être la première visée. Autre menace brandie par Madrid, la suspension de l'autonomie de la Catalogne, prévu par la constitution, mais jamais utilisée. Le ministre des Finances a également évoqué la menace de couper les vivres à cette région très endettée et qui peine à payer ses fournisseurs.
Un mouvement indépendantiste qui dérange.
Plusieurs responsables politiques catalans sont déjà poursuivis en justice, accusés d'avoir organisé une consultation illégale sur l'indépendance de la Catalogne l'année dernière. Ils avaient organisé, le 9 novembre 2014, une consultation sur l’indépendance de la plus riche région d’Espagne dont la portée était uniquement symbolique. Elle avait été organisée dans des écoles, ce qui est dénoncé par la justice, qui considère qu’il y a là un détournement de fonds publics.
Depuis plusieurs années, le mouvement séparatiste, jusque-là minoritaire, n'a cessé de gagner du terrain, alimenté par la crise économique. Depuis 2012 il réclamait un référendum sur l'indépendance de cette région de 7,5 millions d'habitants qui produit un cinquième du PIB de l'Espagne. Ce dernier a toujours été refusé par Madrid.
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18:33 Publié dans Blog, Catalunya, Histoire européenne, Ibères, Politique / économie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : espagne, catalogne, indépendance, droit des peuples...
20/08/2015
La Catalogne de 2015 est-elle comparable à l’Irlande de 1918 ?
La Catalogne de 2015 et l'Irlande de 1918...
BREIZ ATAO – KOMZOU DIEUB (18/08/2015)
En décembre 1918, une liste indépendantiste emportait la majorité des sièges irlandais aux élections britanniques. Trois ans avant la création du premier Etat irlandais. Un scénario qui séduit les souverainistes catalans. Mais est-il comparable ?
La volonté de faire des nouvelles élections catalanes un « référendum de substitution » sur l’indépendance de la part des partis souverainistes a rappelé à certains observateurs un précédent historique, celui de l’Irlande. Ce précédent a été clairement évoqué par Antoni Vives, l’éditorialiste du quotidien de langue catalane de Barcelone, Ara, qui compare le scrutin catalan du 27 septembre prochain avec celui du 14 décembre 1918 en Irlande. L’idée est de mettre en avant la capacité avec laquelle le parti indépendantiste irlandais Sinn Fein est parvenu alors à faire de ces élections, qui étaient des élections générales britanniques, un référendum de fait sur le maintien ou non de l’Irlande dans le giron de Westminster. Le succès de cette liste a permis de déboucher sur la création d’un “Etat libre d’Irlande” en 1921 qui a détaché presque entièrement les comtés catholiques irlandais de Londres.
Une longue tentative d’assimilation
L’Irlande de 1918 serait donc le modèle pour la Catalogne de 2015. Mais qu’en est-il exactement ? Plusieurs éléments de comparaison semblent corrects, à commencer par la construction des “nations” irlandaises et catalanes. Au début du 20ème siècle, l’Irlande est britannique depuis très longtemps. La conquête a débuté en 1169, sous la direction d’Henri II Plantagenêt. De même, la Catalogne est « espagnole » depuis le Moyen-âge, selon un processus différent cependant car le Comté de Catalogne, issue de l’empire carolingien, est la base du Royaume d’Aragon, un des trois royaumes constitutifs de la monarchie espagnole. A partir de la fin du 15ème siècle, cependant, le pouvoir se concentre sur Madrid. De même, en Irlande, le pouvoir anglais s’est progressivement renforcé, notamment après la « glorieuse révolution » de 1688. En 1801, un acte d’Union est voté à Westminster sur le modèle de celui unissant l’Angleterre à l’Ecosse en 1704. Le parlement de Dublin est supprimé et l’Irlande, dirigée par un Lord gouverneur depuis le Château de Dublin, est intégré au Royaume-Uni. Cet acte d’union n’est pas sans rappeler la suppression des libertés et des droits de la Catalogne après la prise de Barcelone par les troupes du Roi d’Espagne Philippe V, neveu de Louis XIV de France, le 11 septembre 1714. La Catalogne va alors progressivement être « hispanisée » comme l’Irlande va être « anglicisée. »
Un particularisme vivace
Dans les deux cas, le sentiment de particularisme ne s’est pourtant jamais éteint. Il s’est appuyé sur des moteurs différents, cependant. Les Irlandais abandonnent la langue gaëlique pour adopter l’anglais, mais la religion catholique devient un des ferments du sentiment national, en opposition au Protestantisme britannique. En Catalogne, c’est davantage la langue qui joue ce rôle, puisque la religion catholique est partagée avec le reste de l’Espagne.
L’élément social joue également un rôle important dans les deux cas. L’Irlande est au 19ème siècle le territoire le plus pauvre du Royaume-Uni, et même d’Europe. La grande famine de 1846-48 et la lenteur de l’aide britannique renforce l’idée qu’une Irlande autonome serait plus « protectrice » pour sa population. En Catalogne, la situation est différente, car la région figure parmi la plus riche d’Espagne, mais c’est aussi celle où le mouvement ouvrier se développe le plus rapidement, entraînant un ancrage à gauche du mouvement indépendantiste. Durant la seconde République espagnole (1931-1936), le parti dominant en Catalogne est ainsi la « Gauche Républicaine Catalane » (Esquerra Republicana de Catalunya, ERC), qui a pour ambition de créer un « Etat social » catalan.
Pendant longtemps, le choix de l’autonomie
Dernier point commun : l’Irlande et la Catalogne ont longtemps choisi la voie de l’autonomie. Durant tout le 19ème siècle, la lutte des Irlandais, notamment du « Grand Libérateur », héros du combat pour la liberté de l’Irlande au milieu du siècle, Daniel O’Connell, a été de rétablir un parlement à Dublin et d’obtenir une « autonomie » (« Home Rule »). Le mouvement indépendantiste est alors très minoritaire dans l’île verte. Aux élections de décembre 1910 (qui ne se font pas réellement au suffrage universel), les partisans du Home Rule obtiennent 102 sièges contre 2 seulement pour les indépendantistes.
En Catalogne, le phénomène est assez comparable. Les Catalans ont longtemps été très largement attachés à l’Espagne et simplement favorables à un statut d’autonomie. Durant la première république espagnole (1871-73), les Catalans réclament un Etat fédéral. Même après les leaders d’ERC n’ont pas osé, durant la seconde république, proclamer l’indépendance. Après le retour de la démocratie, c’est le choix de Jordi Pujol, qui a dirigé la région pendant 23 ans, de 1980 à 2003, qui s’est imposé : celui de larges transferts de compétences de Madrid vers Barcelone dans le cadre de l’Etat espagnol. L’indépendantisme, alors représenté par ERC, est demeuré à un niveau électoral assez faible (pas plus de 16 % aux élections régionales).
La poussée indépendantiste en Irlande
Dans les deux cas, la poussée de l’indépendantisme provient d’une certaine incapacité du pouvoir central à comprendre les volontés de ces territoires et à en reconnaître l’originalité dans le cadre national. En Irlande, néanmoins, l’histoire est beaucoup plus violente qu’en Catalogne.
L’étincelle qui a fait naître dans l’île verte le sentiment indépendantiste est le soulèvement de Pâques 1916 à Dublin. Les activistes nationalistes armées prennent alors le contrôle de plusieurs bâtiments officiels de la ville, dont la Poste centrale, où ils proclament l’indépendance de la « république d’Irlande. » L’armée britannique intervient avec violence pour réprimer cette action qui, alors, n’est pas soutenue par la population de la ville. Comme l’a écrit le poète irlandais William Butler Yeats, « Pâques 1916 a tout changé, complètement » (« all changed, changed utterly ») en Irlande. La répression aveugle qui s’abat sur le pays, la mauvaise foi de Londres qui voit dans le mouvement indépendantiste un “complot allemand” et la décision britannique d’établir la conscription en Irlande, retournent rapidement l’opinion.
Le parti indépendantiste Sinn Fein, jusqu’ici marginal, devient alors la force dominante de la politique irlandaise. La plupart des Irlandais catholiques jugent alors qu’il n’est plus possible de demeurer dans le Royaume-Uni et de cohabiter avec les Britanniques. Lors de son congrès d’octobre 1917, Eamon de Valera parvient à fédérer au sein du Sinn Fein tous les mouvements en faveur de la séparation avec Londres, quel que soit leur « couleur » politique. C’est ce mouvement qui, en décembre 1918, obtient 74 des 105 sièges irlandais (hors Ulster) lors des élections générales.
La poussée indépendantiste en Catalogne
En Catalogne, le mouvement est moins franc et moins violent, mais assez comparable. La décision en 2010 du Tribunal Constitutionnel de Madrid de ne pas valider le statut catalan de 2006 a provoqué une forte poussée indépendantiste. Beaucoup de Catalans ont eu, eux aussi, le sentiment, qu’il n’était plus possible de demeurer dans une Espagne qui refusait de transférer davantage de compétence à leur région. Ce sentiment s’est encore accru avec la politique d’austérité menée par le gouvernement Rajoy qui a conduit beaucoup à estimer que l’Etat providence n’était possible que dans le cadre catalan. Enfin, les fins de non-recevoir de Mariano Rajoy face aux demandes d’évolution des Catalans, ses blocages face au projet de référendum, ont achevé de renforcer un indépendantisme qui désormais représente au moins 40 % des électeurs catalans.
Le phénomène le plus significatif de cette évolution a été la conversion à l’indépendantisme du parti de Jordi Pujol, la CDC, qui a mis fin à sa coalition avec les chrétiens démocrates autonomistes. Son leader, le président de la région Artur Mas, a alors joué le rôle d’Eamon De Valera et a créé le 20 juillet dernier, une liste unique pour l’indépendance regroupant son parti, plutôt centriste, et ERC. Avec une différence, cependant : l’extrême-gauche indépendantiste, la CUP, ne rejoindra pas le mouvement.
La question de l’irrédentisme
Le parallélisme est donc frappant. Il existe cependant des différences. La question irlandaise a ainsi été marquée par la question de l’Ulster, peuplé majoritairement de Protestants considéré par une partie des Catholiques comme des « colons. » Une question qui a empoisonné le mouvement nationaliste irlandais des deux côtés de la frontière jusque très récemment. Une telle question n’existe pas en Catalogne, où le « nationalisme » est ouvert, y compris aux hispanophones et aux Espagnols venus s’installer dans la région. La Catalogne est, du reste, majoritairement hispanophone et l’on a vu lors du référendum du 9 novembre 2014 une partie de ceux qui ne sont pas locuteurs catalans voter pour l’indépendance. Certes, certains indépendantistes catalans revendiquent une unité de toutes les régions de langue catalane, les « Països catalans » (Baléares, Valence, Roussillon français et Frange du Ponant en Aragon), mais ce n’est pas la position officielle du mouvement souverainiste qui limite clairement son ambition à la région de Catalogne.
La question de la violence
Autre différence : l’usage de la violence. Le processus d’indépendance irlandais est un processus violent. L’histoire de l’occupation anglaise en Irlande est une histoire de soulèvements armés réprimés. Et c’est en grande partie ce combat qui a rendu inévitable la rupture avec Londres. On l’a vu lors du soulèvement de 1916. L’indépendantisme catalan a, lui aussi, connu des mouvements violents, notamment sous le franquisme, mais aussi dans les années 1980 avec l’organisation « Terra Lliure » (Terre Libre). Mais ces mouvements ont toujours été très marginaux, à la différence de ce qui s’est passé au pays basque. Et l’indépendantisme catalan a toujours été un mouvement pacifique, soucieux de légalité. Du reste, c’est ce qui a conduit Artur Mas à ne pas faire du référendum du 9 novembre 2014, malgré le triomphe du “oui” à l’indépendance, un élément de rupture avec Madrid.
La « guerre d’indépendance » irlandaise
Or, la victoire du Sinn Fein en 1918 en Irlande n’a pas conduit pacifiquement à l’indépendance. Les députés du Sinn Fein se sont certes retrouvés le 21 janvier 1919 à Mansion House, à Dublin, pour se constituer en Dáil, en parlement irlandais qui a renouvelé la proclamation de 1916. C’est proche de ce que souhaite faire les Catalans en cas de victoire de la liste unitaire : une proclamation de souveraineté. Mais ensuite ? Les Catalans veulent discuter avec Madrid. Les Irlandais, eux, refusaient de discuter avec Londres. Les députés Sinn Fein ne siégeaient pas à Westminster. Et Londres ne souhaitait pas discuter avec eux.
Rapidement, la situation a donc dégénéré. Ce même 21 janvier 1919, une première attaque de l’Armée républicaine irlandaise, l’IRA, était enregistrée dans le comté de Tipperary. Bientôt, les escarmouches ont dégénéré en véritable guerre, appelée les « troubles » à Londres. Des « troubles » qui ont duré deux ans et ont été émaillés de bien des atrocités, comme le massacre d’une douzaine de spectateurs du Croke Park, le stade de sport gaélique de Dublin, par les paramilitaires pro-unioniste le 21 novembre 1920. Cette « guerre d’indépendance » face à un Royaume-Uni épuisé par la guerre mondiale et la pression des Étasuniens, travaillés par De Valera, expliquent qu’au final, Londres accepte de donner à l’Irlande une large autonomie.
La longue marche de l’Irlande vers l’indépendance complète
Une autonomie et non une indépendance. L’acte irlandais de 1920 offre en effet à l’Irlande, amputée des six comtés majoritairement protestants d’Ulster, le statut de « dominion. » L’Irlande devient un « Etat libre » dépendant de la Couronne et ne disposant pas d’une autonomie en politique étrangère et militaire. La proposition britannique est une vraie défaite pour ceux qui voulait la création d’une république indépendante. Certains membres du Sinn Fein, comme Michael Collins, estiment cependant que c’est une première victoire et que la République viendra en son temps. Finalement, la résistance britannique a payé. En mai 1922, les pro-traités remportent les élections au Dáil qui ratifie le texte. Michael Collins devient le premier chef du gouvernement irlandais.
Mais l’opposition républicaine considère désormais que les forces favorables au compromis sont des agents britanniques, puisqu’ils prêtent serment à la Couronne. Elle organise une résistance armée, tandis qu’à la demande de Londres, qui doit déjà faire face au terrorisme républicain, le gouvernement de Dublin organise la répression. L’Irlande s’enfonce dans une guerre civile qui durera onze mois, de juin 1922 à mai 1923 et se solde par une victoire gouvernementale.
Cette division va donner naissance aux deux grands partis traditionnel irlandais, le Fine Gael est issu du camp pro-traité. Le Fianna Fail, créé par Eamon De Valera, est issu du mouvement anti-traité. Quant au Sinn Fein actuel, il est l’héritier de ceux qui ont refusé les compromis avant et après la guerre civile.
Eamon de Valera, perdant de la guerre civile, va pourtant en 1932, devenir premier ministre et accepter formellement le statut de l’Etat libre. Progressivement, mais avec prudence, il démantèle les clauses les plus contraignantes du Traité. Profitant ainsi de la crise de l’abdication d’Edouard VI en 1936, il fait passer en urgence une loi qui libère le pays des principaux éléments de tutelle britannique, ce qui permet au pays de se proclamer neutre en 1939. Mais il faut attendre 1948 pour que l’Irlande devienne formellement une république et sorte du Commonwealth.
La possibilité d’un refus de discuter de Madrid
En cas de victoire le 27 septembre, les indépendantistes catalans pourraient aussi faire face à des difficultés comparables. Si les indépendantistes demandent l’ouverture de discussions, Madrid pourrait fort bien refuser net le processus de séparation. C’est la position de Mariano Rajoy qui a déclaré voici quelques jours que « la Catalogne ne sera jamais indépendante. » En cas de victoire lors des élections de novembre du parti populaire de Mariano Rajoy et d’une alliance entre ce dernier et le parti des Citoyens, parti issu de l’unionisme catalan, on risque de se retrouver face à un vrai blocage. Mais, même un gouvernement de gauche ou du centre pourrait ne pas accepter le fait accompli des élections catalanes, comme Londres n’a pas accepté le résultat du scrutin de 1918. Le gouvernement de Barcelone devra alors choisir une voie. S’il décide de poursuivre dans la construction d’un État catalan, Madrid pourrait utiliser le fameux article 155 de la constitution espagnole qui permet de “prendre toutes les mesures nécessaires pour contraindre une communauté autonome à respecter ses obligations “, notamment lorsqu’une de ces régions “porte gravement atteinte à l’intérêt général de l’Espagne.”
Quelle réponse à un blocage de Madrid ?
Dans ce cas, comment répondre ? Par la sécession, comme le promettent les indépendantistes ? Mais alors, si Madrid répond par l’usage de la force pour empêcher cette sécession dans les faits, que se passera-t-il ? Irrémédiablement, la question qui s’est posée aux indépendantistes irlandais de 1919 à 1923 se posera aux indépendantistes catalans. Faudra-t-il répondre à la force par la force pour contraindre Madrid à négocier, au risque de faire perdre de la popularité à la cause ? Faudra-t-il accepter un compromis, exclu explicitement par l’existence d’une « liste unitaire indépendantiste » ? Faudra-t-il demeurer dans la légalité espagnole ? Comment en appeler à la solidarité internationale alors que, comme pour l’Irlande en 1919, les grands pays européens observent avec méfiance le mouvement catalan ? L’Union européenne pourra-t-elle, saura-t-elle agir en médiateur ? Décidément, le cas irlandais est un cas utile pour la réflexion que doivent engager les indépendantistes catalans.
Romaric Godin, article original paru sur La Tribune
La grande poste centrale de Dublin (ci-dessus) où la république a été proclamée lors du soulèvement de Pâques 1916. (Photo: la poste centrale de Dublin, le 27 novembre 2010, pendant la manifestation contre les mesures d'austérité du gouvernement et sa demande de prêt auprès de l'UE et du FMI) (Crédits : Reuters)
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