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30/12/2015

Adresses conseillées : El bloc d'un català identitari

Une petite sélection d'articles (récents), parus sur l'excellent blog de Llorenç Perrié AlbanellEl bloc d'un català identitari, lliure i europeu ), découvert ce matin même et tout nouvellement créé... mais qui ne peut qu'immédiatement retenir l'attention de ceux et celles pour qui les concepts de "racines" et "identités charnelles" ont encore une signification.   

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CORSE :
La mayonnaise "pas d'amalgame" ne prend pas.

Depuis la victoire des nationalistes corses au soir du second tour des élections régionales, les « pas d’amalgamistes » en prennent pour leur grade. La République jacobine prend la claque identitaire en pleine figure. C’est bien le vote communautaire d’un peuple insoumis qui renvoie le « vivre ensemble républicain » là d’où il n’aurait jamais dû sortir, c’est-à-dire dans les poubelles de l’histoire. En effet la Corse ce n’est pas le continent, Ajaccio ce n’est pas Calais. En quelques heures le peuple corse a réussi à faire ce que les continentaux n’osent plus faire, englués qu’ils sont dans les lois antiracistes, lois en réalité anti-gauloises, anti-européennes. La nuit de Noël deux pompiers et un policier ont été blessés à Ajaccio après être tombés dans une embuscade dans une cité.

Les Corses ont très bien reçu le message du président du SDIS de Corse du Sud, Charles Voglimacci, qui a déclaré dans un communiqué à propos des personnes qui ont agressé les pompiers et policiers : « Ici c’est Ajaccio et nous ne laisserons personne dicter ses propres règles, imposer la peur et s’accaparer un quartier de notre ville. Si cela les indispose, ils sont libres de partir. »

Vous connaissez la suite : plus de six cents personnes se sont réunies le lendemain devant la préfecture pour manifester leur colère. Entre 250 et 300 manifestants sont descendus ensuite dans le quartier en question en scandant « Arabi Fora » (« Arabes Dehors ») et « On est chez nous ». Une mosquée a été attaquée ainsi que la terrasse d’un kebab.

Ce qui différencie le peuple corse de ses cousins européens du continent, c’est cette volonté de conserver intacte la souche communautaire, ainsi qu’une volonté farouche de préserver sa terre de la moisissure qui se répand des zones de non droit jusqu’à la porte de nos foyers. La rue appartient à ceux qui y descendent, les Ajacciens l’ont bien compris. En ce moment même, une poignée d’hommes et de femmes bravent l’interdit préfectoral qui prohibe toute manifestation aux alentours du domicile supposé des malfaiteurs. Nous ne devons pas nous contenter d’être admiratifs devant une telle résistance face à la racaille et à l’Etat, nous devons les imiter. Quant à Gilles Simeoni, nouveau président du Conseil exécutif de la Collectivité Territoriale de Corse, nous ne pouvons que regretter ses prises de position, soucieux qu’il est sans doute de plaire aux gardiens du politiquement correct. Une prise de position en décalage avec son électorat nationaliste qui n’a que faire du fameux « pas d’amalgame ».

Llorenç Perrié Albanell / Perpignan le 27-12-15

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Corse, l’insoumise

Au soir du dernier tour des élections régionales du dimanche 13 décembre, les nationalistes corses ont remporté une victoire historique aux élections territoriales en Corse. La liste « Per a Corsica » (Pour la Corse), issue de la fusion des autonomistes (17,62% au 1er tour) et des indépendantistes (7,73%), a obtenu 35,34% des voix. Il s’agit d’un tournant majeur dans le processus d’autodétermination de l’Ile de Beauté. Évidemment, ces résultats attisent la haine des jacobins de tous bords. Ces derniers, en effet, ne comprennent pas, ne comprendront jamais qu’il puisse exister une autre identité que l’identité administrative : l’identité charnelle.

En Corse, c’est le « vivre corse » qui prime, et non pas le « vivre ensemble », utopie institutionnelle au bord de l’explosion en France. Les Corses ont marqué leur désir de rester eux-mêmes, et c’est tant mieux, ce siècle sera celui du réveil des identités.

Nos jacobins s’offusquent qu’à l’assemblée de Corse on s’exprime en corse, langue vernaculaire jusqu’à preuve du contraire, bien que le discours de son président Jean-Guy Talamoni ait été traduit en français.

Les jacobins ne comprennent pas ou font mine de ne pas comprendre qu’il est mille fois préférable que dans les écoles corses, occitanes, bretonnes ou catalanes, on enseigne la langue du pays, l’histoire locale et les danses traditionnelles à la place de l’arabe dialectal, d’une histoire sélective pour servir des objectifs obscurs, le zouk ou la zumba.

Les jacobins s’indignent et dénoncent un soit-disant complot mondialiste dès lors qu’il s’agit du nationalisme ethnique, alors que le jacobinisme n’est rien d’autre que de la mondialisation au petit pied.

(...) 

Llorenç Perrié Albanell / Perpignan le 26-12-15.

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Langues régionales : Le bal des faux-culs

Signée en 1999, depuis 15 ans, la fameuse Charte des langues régionales attend toujours d’être ratifiée. Notre président « normal » avait prévu de le faire lors de la campagne présidentielle de 2012. Aujourd’hui, en difficulté pour les élections régionales, la gauche tente un coup de filet pour capter l’électorat régionaliste.  Un coup d’épée dans l’eau pour les apprentis sorciers de l’Élysée ! Leurs adversaires de façade, en ont décidé autrement au Sénat (179 sénateurs) avec l’appui de 9 sénateurs du RDSE (Rassemblement Démocratique et Social Européen) à majorité PRG. Les vieux réseaux jacobino-égalitaristes fonctionnent toujours. Tout est bon pour liquider l’âme des peuples et renforcer la République cosmopolite.

L’argument fumiste mis en avant par la mafia jacobine est le caractère anticonstitutionnel de la Charte. La République ne reconnaît qu’une langue : le français. En revanche, peu d’élus indiquent que cette Charte à un vice caché : la reconnaissance des langues extra-européennes. Ces dispositions mettraient sur un même plan les langues autochtones et des langues allogènes comme l’arabe  dialectal. Seuls certains souverainistes ou éléments de l’extrême-droite tricolore ont relevé ce fait de taille. Un argument de poids pour évincer une fois pour toutes le débat sur le sujet.

La gauche s’exprime en faveur de la ratification au travers de Christiane Taubira qui déclare dans l’hémicycle que : « La vraie question est celle de notre conception de la Nation (…) À mes yeux, celle-ci doit être capable de construire de l’harmonie sans étrangler sa diversité ». Inutile de préciser qu’ici nous ne parlons pas de la même « diversité ». Manuel Valls déplore pour sa part : « la surdité de la droite ».  L’écologiste François de Rugy tweete : « C’est donc la majorité du Sénat – censée être la chambre des territoires de France – qui a rejeté les langues régionales, non-sens ». Toutes ces déclarations prêtent à sourire, lorsque l’on sait que ces personnalités politiques prônent une société d’êtres hors-sol, sans culture propre et enracinée, au bénéfice de la « soupe universelle ». Le seul intérêt dans l’affaire est électoral.

Les sénateurs de droite ? C’est bonnet-blanc et blanc bonnet. En charge du pouvoir, ils auraient sûrement agit autrement afin de conserver leurs prébendes. Ils seraient allés chercher les votes chez les défenseurs des langues régionales. Mais là n’est pas le fond de la question. C’est leur libéralisme viscéral, leur vision marchande du monde, qui fait qu’ils s’opposent de manière si « républicaine » à la ratification. En effet, toute différence identitaire leur apparaît comme une entrave à la société de marché dont ils rêvent. « Niveler pour mieux vendre » un slogan qui sied parfaitement à leur vision du monde. L’incantation républicaine de la sacro-sainte unité territoriale n’est qu’un prétexte sous leur houlette. En fait, la France n’est plus qu’une colonie américaine administrée depuis Bruxelles (Réintégration dans le commandement intégré de l’OTAN, soumission au diktat de Bruxelles, aucune opposition au Traité-transatlantique, etc.).

Nos souverainistes jacobins rejettent la Charte au motif qu’elle représente un danger car des langues extra-européennes présentes dans l’Hexagone se verraient recevoir les mêmes droits que des langues autochtones, ce qui est anormal, je le concède ou bien encore que ces langues risquent de porter préjudice à l’unité de la France.

Deux points à expliciter (car dans la catégorie des faux-culs ils ne valent pas plus que les autres cités plus haut) :

D’abord ce qui risque de nuire à l’unité de la France ce n’est pas les quelques militants régionalistes, autonomistes, voire indépendantistes qui réclament à juste titre des droits pour leur langue et culture. Si on réfléchit bien, c’est l’intransigeance génocidaire du régime jacobin sur ces questions-là qui fabrique les séparatismes. Il n’y a donc pas de fumée sans feu… C’est la République elle-même qui se met en danger en accueillant un flux incessant et considérable d’immigrés inassimilables de par leur culture et leur vision du monde incompatible avec celle des Européens.

Ensuite, ils invoquent le vice caché de la Charte : la reconnaissance de langues minoritaires extra-européennes. Cette disposition est effectivement une aberration. Il s’agit ici d’un faux pluralisme, non historique, fondé sur un égalitarisme forcené d’idéologues souhaitant transposer leur délire universaliste en universalité juridique. Vouloir mettre sur un pied d’égalité des langues qui ne disposent pas de la légitimité d’un territoire historique, c’est saccager tout un système de valeur. Si toutes les langues disposent d’une légitimité juridique, laquelle alors est encore légitime sur un territoire défini ?

Cette charte comporte des vices ? Pourquoi alors ne pas créer une loi qui viserait à protéger et promouvoir les identités et les langues régionales autochtones ? Nous sortirions peut être d’une impasse et du génocide culturel des peuples enracinés ; un véritable rempart contre ce qu’il convient d’appeler « l’idéologie du même ». La « mêmetée », c’est quand l’égalitarisme atteint son pinacle, c’est-à-dire lorsqu’une société est constituée d’hommes identiques et interchangeables. Comment faire alors face à l’avènement d’une gouvernance mondiale, puisque « tout le monde est tout le monde ». Restent les identités charnelles (opposées aux identités administratives), la lutte de l’homme enraciné contre l’homme déraciné. Cette lutte passe également par la défense et la promotion des langues régionales. Une langue n’est pas seulement l’orthographe ou la grammaire, elle est aussi porteuse d’une philosophie et d’une histoire qui crée la diversité, tout ce que nos ennemis détestent : l’identité.

Llorenç Perrié Albanell, Perpignan, le 6 novembre 2015.

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16/12/2012

Saint-Loup

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Saint-Loup

 

Marc Augier (19 mars 1908 – 16 décembre 1990)

 

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L’Homme du Grand Midi

 

J’ai découvert Saint-Loup en décembre 1961. J’avais dix-huit ans et me trouvais en résidence non souhaitée, aux frais de la Ve République, pour incompatibilité d’humeur avec la politique qui était alors menée dans une Algérie qui n’avait plus que quelques mois à être française. On était à quelques jours du solstice d’hiver – mais je ne savais pas encore, à l’époque, ce qu’était un solstice d’hiver, et ce que cela pouvait signifier. Depuis j’ai appris à lire certains signes.

Lorsqu’on se retrouve en prison, pour avoir servi une cause déjà presque perdue, le désespoir guette. Saint-Loup m’en a préservé, en me faisant découvrir une autre dimension, proprement cosmique, à l’aventure dans laquelle je m’étais lancé. à corps et à cœur perdus, avec mes camarades du mouvement Jeune Nation. Brave petit militant nationaliste, croisé de la croix celtique, j’ai découvert avec Saint-Loup, et grâce à lui, que le combat, le vrai et éternel combat avait d’autres enjeux, et une toute autre ampleur, que l’avenir de quelques malheureux départements français au sud de la Méditerranée. En poète – car il était d’abord et avant tout un poète, c’est-à-dire un éveilleur – Saint-­Loup m’a entraîné sur la longue route qui mène au Grand Midi de Zarathoustra. Bref, il a fait de moi un païen, c’est-à-dire quelqu’un qui sait que le seul véritable enjeu, depuis deux mille ans, est de savoir si l’on appartient, mentalement, aux peuples de la forêt ou à cette tribu de gardiens de chèvres qui, dans son désert, s’est autoproclamée élue d’un dieu bizarre – « un méchant dieu », comme disait l’ami Gripari.

J’ai donc à l’égard de Saint-Loup la plus belle et la plus lourde des dettes – celle que l’on doit à qui nous a amené à dépouiller le vieil homme, à bénéficier de cette seconde naissance qu’est toute authentique initiation, au vrai et profond sens du terme. Oui, je fais partie de ceux qui ont découvert le signe éternel de toute vie, la roue, toujours tournante, du Soleil Invaincu.

Chaque livre de Saint-Loup est, à sa façon, un guide spirituel. Mais certains de ses ouvrages ont éveillé en moi un écho particulier. Je voudrais en évoquer plus particulièrement deux – sachant que bien d’autres seront célébrés par mes camarades.

 

Au temps où il s’appelait Marc Augier, Saint-Loup publia un petit livre, aujourd’hui très recherché, Les Skieurs de la Nuit. Le sous-titre précisait : Un raid de ski-camping en Laponie finlandaise. C’est le récit d’une aventure, vécue au solstice d’hiver 1938, qui entraîna deux Français au-delà du Cercle polaire. Le but ? « Il fallait, se souvient Marc Augier, dégager le sens de l’amour que je dois porter à telle ou telle conception de vie, déterminer le lieu où se situent les véritables richesses. »

Le titre du premier chapitre est, en soi, un manifeste : « Conseil aux campeurs pour la conquête du Graal. » Tout Saint-Loup est déjà là. En fondant en 1935, avec ses amis de la SFIO et du Syndicat national des instituteurs, les Auberges laïques de la Jeunesse, il avait en effet en tête bien autre chose que ce que nous appelons aujourd’hui « les loisirs » – terme dérisoire et même nauséabond, depuis qu’il a été pollué par Trigano.

Marc Augier s’en explique, en interpellant la bêtise bourgeoise : « Vous qui avez souri, souvent avec bienveillance, au spectacle de ces jeunes cohortes s’éloignant de la ville, sac au dos, solidement chaussées, sommairement vêtues et qui donnaient à partir de 1930 un visage absolument inédit aux routes françaises, pensiez-vous que ce spectacle était non pas le produit d’une fantaisie passagère, mais bel et bien un de ces faits en apparence tout à fait secondaires qui vont modifier toute une civilisation ? La chose est vraiment indiscutable. Ce départ spontané vers les grands espaces, plaines, mers, montagnes, ce recours au moyen de transport élémentaire comme la marche à pied, cet exode de la cité, c’est la grande réaction du XXe siècle contre les formes d’habitat et de vie perfectionnées devenues à la longue intolérables parce que privées de joies, d’émotions, de richesses naturelles. J’en puise la certitude en moi-même. À la veille de la guerre, dans les rues de New York ou de Paris, il m’arrivait soudain d’étouffer, d’avoir en l’espace d’une seconde la conscience aiguë de ma pauvreté sensorielle entre ces murs uniformément laids de la construction moderne, et particulièrement lorsqu’au volant de ma voiture j’étais prisonnier, immobilisé pendant de longues minutes, enserré par d’autres machines inhumaines qui distillaient dans l’air leurs poisons silencieux. Il m’arrivait de penser et de dire tout haut :  Il faut que ça change… cette vie ne peut pas durer ».

Conquérir le Graal, donc. En partant à ski, sac au dos, pour mettre ses pas dans des traces millénaires. Car, rappelle Marc Augier, « au cours des migrations des peuples indo-européens vers les terres arctiques, le ski fut avant tout un instrument de voyage ». Et il ajoute : « En chaussant les skis de fond au nom d’un idéal nettement réactionnaire, j’ai cherché à laisser derrière moi, dans la neige, des traces nettes menant vers les hauts lieux où toute joie est solidement gagnée par ceux qui s’y aventurent ». En choisissant de monter, loin, vers le Nord, au temps béni du solstice d’hiver, Marc Augier fait un choix initiatique.

« L’homme retrouve à ces latitudes, à cette époque de l’année, des conditions de vie aussi voisines que possible des époques primitives. Comme nous sommes quelques-uns à savoir que l’homme occidental a tout perdu en se mettant de plus en plus à l’abri du combat élémentaire, seule garantie certaine pour la survivance de l’espèce, nous avons retiré une joie profonde de cette confrontation [...]. Les inspirés ont raison. La lumière vient du Nord… [...] Quand je me tourne vers le Nord, je sens, comme l’aiguille aimantée qui se fixe sur tel point et non tel autre point de l’espace, se rassembler les meilleures et les plus nobles forces qui sont en moi ».

Dans le grand Nord, Marc Augier rencontre des hommes qui n’ont pas encore été pollués par la civilisation des marchands, des banquiers et des professeurs de morale.

Les Lapons nomades baignent dans le chant du monde, vivent sans état d’âme un panthéisme tranquille, car ils sont : « en contact étroit avec tout un complexe de forces naturelles qui nous échappent complètement, soit que nos sens aient perdu leur acuité soit que notre esprit se soit engagé dans le domaine des valeurs fallacieuses. Toute la gamme des croyances lapones (nous disons aujourd’hui « superstitions »avec un orgueil que le spectacle de notre propre civilisation ne paraît pas justifier) révèle une richesse de sentiments, une sûreté dans le choix des valeurs du bien et du mal et, en définitive, une connaissance de Dieu et de l’homme qui me paraissent admirables. Ces valeurs religieuses sont infiniment plus vivantes et, partant, plus efficaces que les nôtres, parce qu’incluses dans la nature, tout à fait à portée des sens, s’exprimant au moyen d’un jeu de dangers, de châtiments et de récompenses fort précis, et riches de tout ce paganisme poétique et populaire auquel le christianisme n’a que trop faiblement emprunté, avant de se réfugier dans les pures abstractions de l’âme ».

Le Lapon manifeste une attitude respectueuse à l’égard des génies bienfaisants, les Uldra, qui vivent sous terre, et des génies malfaisants, les Stalo, qui vivent au fond des lacs. Il s’agit d’être en accord avec l’harmonie du monde : « passant du monde invisible à l’univers matériel, le Lapon porte un respect et un amour tout particuliers aux bêtes. Il sait parfaitement qu’autrefois toutes les bêtes étaient douées de la parole et aussi les fleurs, les arbres de la taïga et les blocs erratiques… C’est pourquoi l’homme doit être bon pour les animaux, soigneux pour les arbres, respectueux des pierres sur lesquelles il pose le pied. »

C’est par les longues marches et les nuits sous la tente, le contact avec l’air, l’eau, la terre, le feu que Marc Augier a découvert cette grande santé qui a pour nom paganisme. On comprend quelle cohérence a marqué sa trajectoire, des Auberges de Jeunesse à l’armée européenne levée, au nom de Sparte, contre les apôtres du cosmopolitisme.

 

Après avoir traversé, en 1945,  le crépuscule des dieux. Marc Augier a choisi de vivre pour témoigner. Ainsi est né Saint-Loup, auteur prolifique, dont les livres ont joué, pour la génération à laquelle j’appartiens, un rôle décisif. Car en lisant Saint-Loup, bien des jeunes, dans les années 60, ont entendu un appel. Appel des cimes. Appel des sentiers sinuant au cœur des forêts. Appel des sources. Appel de ce Soleil Invaincu qui, malgré tous les inquisiteurs, a été, est et sera le signe de ralliement des garçons et des filles de notre peuple en lutte pour le seul droit qu’ils reconnaissent – celui du sol et du sang.

 

Cet enseignement, infiniment plus précieux, plus enrichissant, plus tonique que tous ceux dispensés dans les tristes et grises universités, Saint-Loup l’a placé au cœur de la plupart de ses livres. Mais avec une force toute particulière dans La Peau de l’Aurochs.

Ce livre est un roman initiatique, dans la grande tradition arthurienne : Saint-Loup est membre de ce compagnonnage qui, depuis des siècles, veille sur le Graal. Il conte l’histoire d’une communauté montagnarde, enracinée au pays d’Aoste, qui entre en résistance lorsque les prétoriens de César – un César dont les armées sont mécanisées – veulent lui imposer leur loi, la Loi unique dont rêvent tous les totalitarismes, de Moïse à George Bush. Les Valdotains, murés dans leur réduit montagnard, sont contraints, pour survivre, de retrouver les vieux principes élémentaires : se battre, se procurer de la nourriture, procréer. Face au froid, à la faim, à la nuit, à la solitude, réfugiés dans une grotte, protégés par le feu qu’il ne faut jamais laisser mourir, revenus à l’âge de pierre, ils retrouvent la grande santé : leur curé fait faire à sa religion le chemin inverse de celui qu’elle a effectué en deux millénaires et, revenant aux sources païennes, il redécouvre, du coup, les secrets de l’harmonie entre l’homme et la terre, entre le sang et le sol. En célébrant, sur un dolmen, le sacrifice rituel du bouquetin – animal sacré car sa chair a permis la survie de la communauté, il est symbole des forces de la terre maternelle et du ciel père, unis par et dans la montagne –, le curé retrouve spontanément les gestes et les mots qui calment le cœur des hommes, en paix avec eux-mêmes car unis au cosmos, intégrés – réintégrés – dans la grande roue de l’Éternel Retour.

De son côté, l’instituteur apprend aux enfants de nouvelles et drues générations qui ils sont, car la conscience de son identité est le plus précieux des biens : « Nos ancêtres les Salasses qui étaient de race celtique habitaient déjà les vallées du pays d’Aoste. » et le médecin retrouve la vertu des simples, les vieux secrets des femmes sages, des sourcières : la tisane des violettes contre les refroidissements, la graisse de marmotte fondue contre la pneumonie, la graisse de vipère pour faciliter la délivrance des femmes… Quant au paysan, il va s’agenouiller chaque soir sur ses terres ensemencées, aux approches du solstice d’hiver, et prie pour le retour de la la lumière.

Ainsi, fidèle à ses racines, la communauté montagnarde survit dans un isolement total, pendant plusieurs générations, en ne comptant que sur ses propres forces – et sur l’aide des anciens dieux. Jusqu’au jour où, César vaincu, la société marchande impose partout son « nouvel ordre mondial ». Et détruit, au nom de la morale et des Droits de l’homme, l’identité, maintenue jusqu’alors à grands périls, du Pays d’Aoste. Seul, un groupe de montagnards, fidèle à sa terre, choisit de gagner les hautes altitudes, pour retrouver le droit de vivre debout, dans un dépouillement spartiate, loin d’une « civilisation » frelatée qui pourrit tout ce qu’elle touche car y règne la loi du fric.

Avec La Peau de l’Aurochs, qui annonce son cycle romanesque des patries charnelles, Saint-Loup a fait œuvre de grand inspiré. Aux garçons et filles qui, fascinés par l’appel du paganisme, s’interrogent sur le meilleur guide pour découvrir l’éternelle âme païenne, il faut remettre comme un viatique, ce testament spirituel.

Aujourd’hui, Saint-Loup est parti vers le soleil.

Au revoir camarade. Du paradis des guerriers, où tu festoies aux côtés des porteurs d’épée de nos combats millénaires, adresse-nous, de tes bras dressés vers l’astre de vie, un fraternel salut. Nous en avons besoin pour continuer encore un peu la route. Avant de te rejoindre. Quand les dieux voudront.

 

Pierre Vial

L’Homme du Grand Midi, paru dans Rencontres avec Saint-Loup,

Un ouvrage publié par l’association des Amis de Saint-Loup.

 

( Source : Club Acacia ).