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12/08/2013

Fort Chabrol

12 août 1899 : début du « Fort Chabrol »

 

Pierre Waldeck-Rousseau, nommé président du Conseil le 22 juin 1899, quelques semaines avant l’ouverture du procès en révision du traître Dreyfus, craint des émeutes de la part des nationalistes, des royalistes ou des antisémites. Le 12 août, il fait arrêter les dirigeants de la Ligue des Patriotes, et notamment leur chef de file Paul Déroulède.

 

Pour les mêmes motifs, sont également visés par les mandats d’amener délivrés aux policiers les cadres de la Ligue Antisémite. Mais contrairement à Déroulède, il n’est pas question pour eux de se laisser interpeller : dans le sillage de leur président Jules Guérin, 11 militants et activistes se réfugient au 51 de la rue de Chabrol, dans les locaux du Grand Occident de France, fondé quelques semaines plus tôt par ce même Guérin.

Antisémites et antimaçonniques, les adhérents du Grand Occident ont pour signe de reconnaissance les deux poings levés : "un dans la gueule des Juifs, l’autre dans celle des Francs-maçons" !

 

Le 13 août, le sous-chef de la Sûreté, accompagné d’une escouade de policiers, se présente rue de Chabrol pour arrêter Guérin et ses compagnons.

Mais les rebelles ne l’entendent pas de cette oreille : "Pas question de nous rendre. Nous avons des cartouches et des armes. S’il le faut, nous ferons sauter l’immeuble", lance aux policiers Guérin depuis le 1er étage de l’immeuble où il s’est barricadé avec ses amis et quatre employés.

 

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Sur l’ordre de leurs chefs, les gardes républicains se contentent de garder l’immeuble jour et nuit, persuadés que les insurgés vont se rendre rapidement faute de nourriture. C’est compter sans les nombreux sympathisants de la capitale. La résistance s’organise, et un appartement est loué par des amis de Guérin dans le tout proche immeuble du 114 rue de La Fayette d’où le ravitaillement peut être lancé vers le 51 rue de Chabrol. Malgré des pertes, une quantité suffisante de nourriture parvient aux mains des rebelles. Et comme si cela ne suffisait pas, des colis sont jetés aux insurgés par les clients de l’omnibus à impériale qui, plusieurs fois par jour, passe dans la rue. Tout cela sous les clameurs enthousiastes de la foule venue nombreuse soutenir les Ligueurs.

 

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Régulièrement ridiculisés par les ravitailleurs juchés sur l’impériale des voitures hippomobiles, les policiers obtiennent, après plusieurs jours de siège, de la Compagnie Générale des Omnibus que la ligne soit détournée pour ne plus emprunter la rue de Chabrol, jusqu'à la réddition de Jules Guérin et de ses compagnons. Mais les insurgés ont accumulé les vivres et le siège se poursuit, au grand désappointement de Waldeck-Rousseau et du préfet Lépine, impuissants à mettre un terme à cette sédition qui ridiculise le pouvoir en place.

De violents heurts qui opposent nationalistes et anarchistes aux abords de Fort Chabrol (le 20 août) sont éloquents, repoussées en direction du 11ème arrondissement par les renforts de police, ces échauffourées débouchent sur l'incendie de l'église Saint-Joseph-des-Nations rue Saint-Maur. 

Peu à peu, les choses se calment pourtant : les manifestations se raréfient, les policiers ne tentent rien, et les insurgés s’installent dans la durée en attendant le verdict du procès en appel de Dreyfus à Rennes. Dreyfus est une nouvelle fois condamné par  une sentence de 10 années de réclusion précédées d’une nouvelle dégradation. Guérin et ses amis exultent et sont tout près de se rendre lorsqu’ils apprennent le 10 septembre que Dreyfus a déposé un "pourvoi en révision".

Comble d’horreur à leurs yeux, Waldeck-Rousseau semble vouloir tirer un trait définitif sur cette affaire et envisage la grâce du condamné. Dreyfus refuse dans un premier temps car cette mesure de clémence équivaut de facto à reconnaître sa culpabilité. Épuisé par cinq longues et épuisantes années de procédure, il accepte pourtant la mort dans l’âme quelques jours plus tard.

Le 19 septembre 1899, Waldeck-Rousseau signe le décret de grâce qui dégage définitivement Dreyfus de toute action judiciaire. Atterrés par cette nouvelle, Guérin et ses amis se rendent dès le lendemain sans incident notable. Le siège de Fort Chabrol aura duré 38 jours ! Jugés en Haute-Cour, Déroulède et André Buffet furent condamnés à dix ans de bannissement, Guérin à dix ans de détention. Tous les autres accusés furent acquittés, sauf Eugène de Lure-Saluces qui, une fois arrêté, fut condamné à cinq ans de bannissement.

 

En réalité, le but de Waldeck-Rousseau était de réduire le travail politique des nationalistes à une agitation confuse.

 

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Suite à cet événement, l’expression « un fort Chabrol » est passée dans l’usage  pour désigner une situation où un individu – généralement armé, parfois avec otages – se retranche dans un immeuble entouré par les forces de l’ordre…

 

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Source : La Flamme

http://la-flamme.fr/2013/08/12-aout-1899-debut-du-fort-ch...

http://la-flamme.fr/

 

Paul Déroulède :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_D%C3%A9roul%C3%A8de

http://histoire.fdesouche.com/82-paul-deroulede-1846-1914

 

Jules Guérin :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Jules_Gu%C3%A9rin

http://fr.metapedia.org/wiki/Jules_Gu%C3%A9rin

03/08/2013

Dernière séance...

assemblée nationale, monde en perdition, j'm'en foutisme, ripoublique3 députés et 1 sous-ministre présents !

 

Paris, Palais Bourbon, 09h30 le jeudi 25 juillet 2013 …

Ouverture de la dernière séance de l'assemblée nationale avant les vacances de nos besogneux députés… 1 présent et 1 représentant du Gouvernement ! Un tantinet esseulés, le président de séance et le ministre délégué au budget réussissent par huissiers interposés à rameuter deux imprudentes élues du peuple qui traînaient dans le coin où se rafraîchissaient à la buvette du bidule en l'attente de faire leur shopping dans les environs.

3 députés présents dont l'obligé (quand même) président de séance et 2 élues quasiment amenées de force et un sous-ministre, juste de quoi faire une partie de belote ! On ne sait pas trop si cet absentéisme record était motivé par le départ anticipé en villégiature pour éviter la promiscuité populaire sur les routes, dans les gares ou les aéroports ou par un ordre du jour jugé sans intérêt : ratifications de quelques conventions internationales, règlement du budget et des comptes pour 2012, problème des soins sans consentement en psychiatrie mais aussi hommage aux victimes du train fou de San Sebastian… une manifestation probablement jugée broutillesque par les politicards qui s'étaient pourtant dans un bel ensemble mis au garde à vous pour une minute, clapet fermé et oeil humide, en hommage appuyé au haineux gringalet gauchiste qui, il est vrai, a permis de justifier la répression contre les contempteurs de la ripoublique en train de crever. 

On mettra ce bel exemple de dévoûment à la chose publique (res publica) en parallèle avec les avantages des susdits qui au fil des ans, n'ont fait que croître et embellir. En 2103, un damné de la Chambre se prend chaque mois dans la poche des citoyens-contribuables une indemnité de 5189 € nets + 6412 € bruts pour frais de mandat + 9138 € bruts pour ses collaborateurs (souvent conjoint(es) ou proches) + pléthore de privilèges qui ne disparaîtront pas durant la nuit du 4 août  (gratuité en 1ère classe sur tout le réseau SNCF, forfaits gratuits pour Internet et 5 lignes téléphoniques, crédit quasiment gratuit…), 6 mois de "chômage" en cas de non-réélection et aide au retour à l'emploi équivalente à leur indemnité… bref une sinécure byzantine qui justifierait au minimum d'assister aux séances quitte chaque après-midi à s'y abandonner à une douce somnolence gastro-hépatique.

Et ces gens là prétendent représenter le Peuple de France et travailler à son bien-être… décidément on marche sur la tête ! Un grand coup de balai, vite !   

 

Yves Darchicourt

 

Via Synthèse Nationale : http://synthesenationale.hautetfort.com/

http://synthesenationale.hautetfort.com/archive/2013/08/0...

11/07/2013

Alain Soral / Égalité & Réconciliation

Et ouais…

Car même si chez F.E… nous ne sommes pas toujours d’accord avec R.E.

Il est clair que pour ce qui en est de ses vidéos estampillées « mai-juin 2013 », nous avons trouvé l’ami Soral particulièrement inspiré !

 

C’qui fait que hop… hop… et re-hop…

Vérifiez que vos cages à miel sont en bon état de marche…

Et installez-vous confortablement !

 

 


 

  


 

 

ERTV

10/07/2013

Socialistes identitaires européens

R&A : Comment souhaiteriez-vous voir évoluer notre mouvance à l’avenir ?

 

Roberto Fiorini : Nous avons tout un camp identitaire révolutionnaire à construire. Tout un camp à former, à fédérer, et à mettre au travail. En étant capable de produire nos propres analyses, loin de l’œil libéral qui déforme et conditionne, tout en nous enfermant dans la pensée unique. Que notre camp arrête de penser selon le schéma droite/gauche et même d’accepter de se dire d’extrême-droite, car c’est admettre que l’on peut à un moment ou un autre servir de larbin au capitalisme. C’est insupportable ! Être plus pragmatique, tout en cessant de prendre nos désir pour des réalités. Que se construise l’unité des socialistes identitaires européens. Derrière le terme de socialistes, il faut entendre l’obligation qui s’impose à chacun d’entre nous de se mettre au service de sa communauté sans rien attendre en retour. Nous ne sommes pas les derniers d’hier, nous sommes les premiers de demain. 

 

Roberto Fiorini / Réfléchir & Agir N°44, été 2013. 

 

roberto fiorini,réfléchir & agir,socialistes identitaires européens 

27/05/2013

Synthèse Nationale / 1 MILLION !

printemps français,synthèse nationale

http://synthesenationale.hautetfort.com/

http://synthesenationale.hautetfort.com/media/00/02/1749714194.pdf

20/05/2013

Tomislav Sunić : l'Occidentalisme contre l'Europe

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21/04/2013

Les nécessités transcendent...

21 avril 1927 : En Italie, Mussolini promulgue la "Charte du Travail", faisant de l’Italie fasciste un "Etat corporatiste". Les industriels créatifs sont protégés contre tout débordement ouvrier (en fait : contre tout risque de grèves manipulées depuis l’étranger pour briser un élan innovateur national), les ouvriers, en revanche, reçoivent la garantie d’une protection sociale généralisée. Mais les industriels doivent obéir aux injonctions de l’Etat, qui coordonne ainsi le développement de l’industrie nationale. Cette Charte est proclamée dans un contexte international houleux. L’Italie venait de s’allier à la Hongrie de Horthy, de lui livrer des armes, ruinant ainsi les projets perfides de la France de créer un vide politique au centre de notre continent, au nom d’une haine viscérale à l’endroit de la légitimité continentale que représentait, avant 1918, l’Autriche-Hongrie. Par cette alliance avec la Hongrie, réduite et enclavée, Mussolini réduit à néant les manigances de Poincaré et Clemenceau; il réarme Budapest et fragilise les satellites de la France dans la région. En Libye, les Anglais ont soudoyé les Senoussistes de l’est du pays pour créer des manoeuvres de diversion et éloigner les Italiens d’Egypte: les généraux Graziani et Mezzeti mettent tous les moyens militaires en oeuvre pour mater cette rébellion d’intégristes musulmans se réclamant du wahhabitisme saoudien (l’alliance entre le wahhabitisme intégriste et les puissances anglo-saxonnes ne date pas d’hier…). Churchill, pourtant, lance un appel à Mussolini, pour tenter d’en faire un allié en Méditerranée. Cependant, Mussolini recule devant les protestations françaises à l’endroit de sa politique hongroise. Il refuse, épouvanté, les propositions du Comte Bethlen, ministre hongrois, qui souhaite forger un bloc italo-germano-austro-hongrois, sanctionnant de facto l’Anschluss, pour réduire à néant les effets du Traité de Versailles. Julius Evola était partisan, lui, de ce bloc traditionnel, opposé à l’Ouest, au jacobinisme français et à la ploutocratie anglaise. Notons que les propositions de Bethlen ont été formulées bien avant l’avènement de Hitler au pouvoir, quand l’Allemagne était sociale-démocrate.

Les nécessités géopolitiques transcendent les clivages idéologiques.

 

Robert Steuckers 

 

Source : http://robertsteuckers.blogspot.fr/2013/04/ephemerides-da...

http://robertsteuckers.blogspot.fr/

 

mussolini,charte du travail

19/04/2013

Leur drame, c’est d’être anachroniques...

Fiertés Européennes : Bon, soyons clairs et directs : chez F.E nous ne sommes pas vraiment fans de Pierre Lance et encore moins abonnés à L'Ère nouvelle

Mais le petit texte reproduit ci-dessous, déniché au hasard "d'un chemin qui ne menait nulle part mais que nous empruntâmes néanmoins, tandis que nous cherchions un raccourci que (tel David Vincent) jamais nous ne trouvâmes"

Mais le petit texte reproduit ci-dessous (donc), à tout de même retenu notre attention (tant il est en accord, pour beaucoup, avec notre vision des choses) ; malgré une (très incongrue) citation de l'ignoble Luc Ferry et ses petits côtés "valeurs républicaines". 

 

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La guerre civile en Europe avant 2050 ?

Par Pierre Lance.

 

Depuis quelques années, je reçois de nombreux messages émanant d’une demi-douzaine de militants du Front National, qui se donnent beaucoup de mal sur Internet pour diffuser des informations et des commentaires. La principale motivation de ces propagandistes est la hantise de l’immigration musulmane et de toutes les formes de pression qu’exerce cette communauté, et surtout ses éléments extrémistes, pour la modification à leur profit de la culture française. Parmi ces militants, quelques-uns mettent en avant les «racines chrétiennes» de la France et de l’Europe et semblent croire que la renaissance du christianisme, et surtout du catholicisme, permettrait aux Occidentaux de faire échec à l’expansion de l’Islam. C’est une erreur dramatique, car elle aboutirait à transformer un problème ethnologique et démographique en guerre de religion. Je ne suis d’ailleurs pas sûr que ces militants soient plus catholiques que ne l’était Charles Maurras, agnostique notoire qui avait, dans les années 30, choisi de soutenir le catholicisme par tactique politique. Or, ce qui était déjà inopportun il y a 80 ans l’est encore bien davantage aujourd’hui.

 

Cette erreur repose essentiellement sur une ignorance abyssale des véritables fondements de la civilisation occidentale et sur une ignorance non moins abyssale de la nature profonde et commune aux religions monothéistes nées au Proche-Orient et dont les deux premières, le judaïsme et le christianisme, envahirent l’Europe à la faveur de la décadence romaine, tandis que la troisième et la plus virulente, l’islamisme, est en train de le faire à la faveur de notre propre décadence et surtout d’une immigration étrangère que nos gouvernements semblent incapables de maîtriser. A ces deux ignorances s’en ajoute une troisième, encore moins excusable que les deux autres de la part de «nationalistes», puisqu’elle concerne la formation même de la nation française.

 

Comme ces militants me semblent manifestement sincères et de bonne foi, j’aimerais, sans me faire trop d’illusions sur mes chances de succès, tenter de leur ouvrir les yeux sur des réalités historiques avérées qu’aucun honnête homme ne peut contester, sauf en se mentant à lui-même. Je les résume ci-après en 21 paragraphes, aussi succinctement que possible, bien que la plupart exigeraient de plus longs développements :

 

1)  L’expansion du christianisme s’est très longtemps heurtée à la résistance des Gaulois, à qui cette religion étrangère semblait si aberrante qu’ils affublèrent du nom de «chrétien» les débiles mentaux, qualificatif demeuré jusqu’à nos jours dans la langue française sous la forme «crétin» (le terme médical «crétinisme» étant lui-même dérivé de «christianisme»). De la défaite d’Alésia jusqu’à la chute de l’Empire, les Gaulois ne cessèrent de se révolter contre l’occupant. De véritables armées populaires (les Bagaudes, terme celtique signifiant «combattants») mirent en échec le pouvoir romain de 283 à 311 et elles réapparurent à la fin du IVe siècle et au début du Ve. Bien entendu, les Romains disaient de ces révoltés qu’ils étaient des pillards et des brigands, ce que les historiens conformistes ont repris à leur compte sans examen.

 

2)  Les Gaulois ne purent finalement être soumis au despotisme de l’Église romaine que par la faute de Constantin 1er (272-337), dont la fausse conversion au christianisme, opération de pur opportunisme politique, lui assura le soutien de l’Église, l’élimination de ses concurrents et sa domination sur tout l’empire romain. Ce prétendu chrétien fit assassiner son fils aîné Crispus et son épouse Fausta, en 326. Après l’avènement de Constantin, la collusion entre le pouvoir politique et le pouvoir clérical fut totale, amenant Constantin à faire du catholicisme la religion d’État.

 

3)  La seconde grande trahison de l’esprit occidental fut celle de Clovis (466-511), lui aussi faux converti au christianisme par arrivisme politique, ce qui lui apporta le soutien de l’Église romaine pour installer sa dictature sur toute la Gaule. Cet assassin multirécidiviste fit exécuter tous ses rivaux, les chefs saliens et rhénans voisins, certains de ses anciens compagnons et les membres de sa propre famille qui auraient pu revendiquer sa succession contre ses fils, soit au total une dizaine de meurtres. Mais il semble qu’aux yeux du clergé catholique, son baptême chrétien l’ait lavé de toute faute.

 

4)  Ce chef de gang sans scrupules est toujours célébré aujourd’hui par les catholiques français, qui veulent voir en lui le fondateur de notre nation. Cette absurdité est contredite par le fait indéniable que la première unité nationale de notre pays est due à Vercingétorix, qui la réalisa cinq siècles plus tôt, et l’on peut même affirmer qu’elle préexistait à la formidable entreprise de résistance anti-romaine du prince arverne, car comment celui-ci aurait-il pu susciter la formation d’une armée de secours autour d’Alésia, comprenant des contingents de toutes les tribus gauloises (au total 300.000 guerriers, chiffre stupéfiant pour l’époque), si celles-ci n’avaient pas déjà eu conscience de l’unité profonde de leur culture ?

 

5)  Les prétendues «racines chrétiennes» de la France ne sont donc rien d’autre qu’une escroquerie intellectuelle entretenue par l’Église romaine. Est-il besoin d’être horticulteur pour savoir différencier une racine d’un greffon ? Le christianisme est un greffon oriental imposé à nos aïeux par la force et la ruse, grâce au concours successif de deux arrivistes sans foi ni loi : Constantin et Clovis. Charlemagne prit leur suite en imposant le christianisme aux Germains par la guerre. Il fit massacrer 4.500 Saxons qui refusaient le baptême chrétien. La peine de mort fut décrétée contre tous ceux qui voulaient demeurer païens. Prétendre que les Européens ont des «racines chrétiennes» est aussi absurde et mensonger que le serait de dire que les évangélistes afro-américains chanteurs de gospels ont des «racines chrétiennes», alors que le christianisme fut imposé à leurs ancêtres par les esclavagistes. Ce qui prouve à quel point il ne suffit pas d’être physiquement libre pour être délivré de ses chaînes mentales. Les chrétiens résiduels européens sont toujours des esclaves psychiques.

 

6)  Les véritables racines du peuple français (comme des autres peuples européens), sont à rechercher dans les principes éthiques et philosophiques du paganisme, du polythéisme et du druidisme, honteusement calomniés depuis vingt siècles par les zélateurs de Rome, et de ce fait totalement ignorés des Français d’aujourd’hui, qui ont été littéralement amputés de leur propre Antiquité historique. Les monothéistes, qu’ils soient juifs, chrétiens ou musulmans, ne se rendent pas compte à quel point ils ont été «lobotomisés» dans leur enfance par des religions contre-nature qui n’ont cessé d’abaisser et d’humilier l’être humain pour le prosterner devant un Seigneur céleste imaginaire, au seul profit de pouvoirs despotiques soutenus par des clergés félons.

 

7)  Les adeptes des trois cultes abrahamiques ont été persuadés par la propagande cléricale que le monothéisme est supérieur au polythéisme et qu’il était un progrès par rapport à lui, alors qu’il fut au contraire une tragique régression de la vraie spiritualité humaine, notamment européenne. Comme Nietzsche l’a clairement vu et affirmé : «Le polythéisme était une première image de la libre pensée, de la «polypensée» de l’homme.» Aussi n’est-ce pas un hasard si, de nos jours, les Français et les Européens tournent le dos au christianisme et retrouvent leurs vraies racines. (Plus de 50% d’entre eux déclarent ne pas croire en Dieu, les Tchèques arrivant en tête avec plus de 70%). C’est le seul continent où se produit ce phénomène, apportant la preuve que les Européens sont toujours en tête du progrès de la civilisation et de l’esprit.

 

8 ) Le polythéisme ayant toujours été jugé comme archaïque, primitif et barbare, très peu d’Occidentaux, même libre-penseurs, sont aujourd’hui capables d’en apprécier la valeur philosophique et spirituelle. Pourtant, le professeur et ancien ministre Luc Ferry écrit dans son récent ouvrage «De Homère à Platon» (Edition Le Figaro/Le Point, sept 2012) : «Les philosophes (grecs) connaissaient admirablement la mythologie : c’était tout simplement la culture commune de leur temps et, sous une apparence littéraire, elle fourmillait déjà d’idées métaphysiques d’une profondeur inouïe.» Ces philosophes, notamment Aristote, considéraient les druides gaulois comme leurs pairs.

 

9)  Les mythologies européennes (grecque, romaine, celtique, germanique…) sont effectivement nos vraies racines culturelles, et d’ailleurs elles fascinent toujours les esprits européens, même lorsqu’ils n’en saisissent pas toute la profondeur. Leur principal mérite était de placer l’homme au cœur de la nature et du cosmos, de le relier pleinement à tous les vivants animaux et végétaux de même qu’aux planètes entourant la nôtre. Les monothéismes, tout au contraire, s’acharnèrent à briser cette fraternité naturelle et cosmique et à conduire les humains au mépris des autres espèces et de leur propre corps ainsi qu’à la honte de leurs instincts les plus naturels.

 

10) Les principaux dieux du polythéisme étaient en fait des transpositions des planètes du système solaire, qui portent toujours leurs noms, et, issus du savoir astronomique et astrologique des Anciens, ils symbolisaient l’influence des planètes sur les destinées terrestres et représentaient donc des types psychologiques humains. Aujourd’hui encore, les noms des jours de la semaine sont ceux des planètes : (Lundi, jour de la Lune, Mardi, jour de Mars, Mercredi, jour de Mercure, etc.). Dans l’antiquité pré-chrétienne, le premier jour de la semaine (et non le septième) était dévolu au Soleil et nous devrions le nommer Soldi, à l’instar des Anglo-Saxons qui le nomment Sunday, des Allemands qui le nomment Sonntag, des Hollandais qui le nomment Zondag, et non pas Dimanche (du latin «dies dominicus», jour du Seigneur), imposé par l’Église.

 

11) La plus grande fête du monde païen était celle du solstice d’hiver (25 décembre), qui symbolisait la remontée du Soleil au-dessus de l’horizon et le début de l’allongement de la durée du jour. (No Hel, Nouveau Soleil en celtique, en grec Néo Hélios.) Cette fête était célébrée par tous les peuples de l’hémisphère nord depuis des millénaires avant Jésus-Christ. L’ Église romaine ne parvenant pas à éradiquer cette célébration naturaliste populaire, le pape Jules 1er, au IVe siècle, «décida» d’en faire la date de naissance de Jésus (ignorée à jamais). Cette usurpation eut pour principale conséquence de transformer une fête universelle en fête sectaire réservée à une seule religion, ajoutant un nouvel obstacle à la fraternité planétaire. Aujourd’hui, les musulmans radicaux boudent Nohel, qu’ils croient fête chrétienne, ignorant que c’est une fête concernant toute l’humanité, car le Soleil brille pour tous les hommes.

 

12) Il est impossible de bien comprendre les rivalités politico-religieuses qui sous-tendent l’histoire du monde depuis l’Égypte ancienne, si l’on veut ignorer qu’elles sont le reflet terrestre de la rivalité céleste Soleil/Jupiter (ou Hélios-Zeus, ou Aton-Amon). Il faut savoir que Jupiter, la plus grosse de nos planètes, faillit elle-même «s’allumer» et devenir notre seconde étoile lors de la formation du système solaire. Les chrétiens d’aujourd’hui (de même que les juifs et les musulmans) seraient sûrement très étonnés d’apprendre que lorsqu’ils disent «Amen» (qu’ils traduisent par «Ainsi soit-il»), ils ne font que célébrer le nom légèrement déformé du dieu égyptien Amon, que les Grecs assimilaient à Zeus, et qui ponctuait les prières dans les temples pharaoniques.

 

13) Au cours de la XVIIIe dynastie égyptienne (-1550 à -1292), un pharaon révolutionnaire du nom de Amenhotep IV (époux de la célèbre Nefertiti) changea son nom, qui signifiait «Amon est satisfait» en Akhenaton («l’Efficience d’Aton») et s’efforça de briser le despotisme que les prêtres d’Amon exerçaient sur le peuple égyptien. Mais ses réformes trop radicales échouèrent et son fils et successeur Toutânkhaton («L’image vivante d’Aton») dut y renoncer et changer son nom en celui de Toutânkamon («L’image vivante d’Amon»), avec lequel il est passé à la postérité. Certains auteurs ont présenté Akhenaton comme «l’inventeur du monothéisme», mais c’est une grave erreur.  Il voulait seulement redonner sa place légitime au Soleil (Aton), seul dispensateur de lumière et de chaleur, véritable père de la vie terrestre et inspirateur de toute créativité, dont le rôle avait été usurpé au bénéfice d’Amon.

 

14) Tout ceci recouvre évidemment des rivalités politiques pratiquement éternelles entre les «solaires» (réformateurs, créatifs, individualistes, écologistes, libéraux, libertaires) et les «jupitériens» (conservateurs, cléricaux, jacobins, collectivistes, technocrates, autoritaires) qui se répartissent «transversalement» entre ce qu’on appelle aujourd’hui la «droite» et la «gauche», créant une confusion permanente au sein de laquelle aucun peuple ne peut «retrouver ses petits». Les prêtres romains de Jupiter traduisaient son nom par «le père du jour», usurpation évidente, le seul «père du jour» possible étant le Soleil. Le vrai sens de Jupiter est «le père du joug» (l’autorité absolue) cousin sémantique du mot jument, du latin jumentum (animal sous le joug).

 

15) On voudra bien me pardonner ces incursions dans les grands mythes de l’Antiquité, mais elles m’ont semblé nécessaires pour faciliter aux esprits libres et ouverts la compréhension des grands courants religieux et politiques dont nous sommes tous les héritiers, le plus souvent à notre insu. Ce qu’il faut bien saisir, si nous voulons maîtriser et harmoniser l’avenir de notre patrie et celle de la civilisation occidentale, c’est qu’il est illusoire d’utiliser un monothéisme pour se préserver d’un autre. Les serviteurs de Jehovah, d’Allah ou de Dieu peuvent bien être concurrents ou rivaux, ils n’en vendent pas moins le même mensonge sous des emballages différents. Si vous en doutez, il vous est facile d’en avoir la preuve : demandez à un prêtre catholique s’il se sent plus proche d’un Européen athée que d’un musulman et vous serez édifié par sa réponse.

 

16) J’entends dire aujourd’hui que l’Islam est la seconde religion de France. C’est une sottise. Cette religion ne concerne en aucune façon les Français. Elle est la religion des immigrés venus du continent africain et, en partie, de leurs descendants. Mise à part une infime minorité d’influençables, les Français et les Européens ne deviennent absolument pas musulmans. Les progrès de l’Islam en Europe sont uniquement dus au développement de la population d’origine musulmane, tant par l’immigration que par la natalité. C’est un phénomène démographique et nullement religieux. Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, les Français et les Européens, dans leur immense majorité, se désintéressent de toutes les religions, sauf peut-être, très minoritairement, du bouddhisme, qui est d’ailleurs une religion athée.

 

17) Le fondateur de l’Islam, Mahomet, était dans sa jeunesse polythéiste. La Kaaba (qui signifie «Le cube») devenue le lieu sacré des pèlerinages musulmans, était alors, au centre de La Mecque, un lieu de prières et de cérémonies polythéistes, ce que la plupart des musulmans ignorent. C’est un moine chrétien qui initia Mahomet au monothéisme biblique judéo-chrétien et devina en lui l’étoffe d’un «prophète». Mais ce n’est que vers l’âge de 40 ans que Mahomet commença de prêcher «son» monothéisme, après l’échec d’une tentative d’union avec les juifs. L’Arabie était à l’époque en proie à l’anarchie et pratiquement ruinée. On peut supposer que Mahomet vit dans le monothéisme un facteur d’unité sociale et politique nécessaire aux Arabes. Après de longues méditations dans les grottes proches de Médine, il écrivit le Coran, en prétendant que celui-ci lui avait été dicté par l’archange Gabriel.

 

18)  Toute religion naissante doit trouver un soutien populaire, et doit donc intégrer plus ou moins les coutumes traditionnelles existantes et s’adapter à la psychologie des peuples qu’elle veut soumettre à sa loi. C’est ainsi que le catholicisme romain dut s’adapter partiellement aux coutumes gauloises, soit en confisquant la fête de No Hel, comme nous l’avons vu précédemment, soit en adoptant, non sans réticences, le principe du libre arbitre soutenu par le moine celte Morgan (dit Pélage), auquel s’opposait violemment St-Augustin. Mais le libre-arbitre s’imposa finalement, étant pratiquement consubstantiel à la psychologie des Européens. Analogiquement, on peut dire que Mahomet édifia un monothéisme mieux adapté à la mentalité arabe que le judéo-christianisme. De même que Luther, à travers le protestantisme, adapta ce même judéo-christianisme à la psychologie des peuples germaniques.

 

19)  Néanmoins, le progrès des sciences et de la connaissance de l’univers a rendu les trois monothéismes complètement obsolètes. Ce ne sont plus que des stratifications archaïques d’époques et de sociétés dépassées. Nos cathédrales sont d’admirables témoignages de l’architecture et des arts occidentaux de l’époque et elles appartiennent désormais à l’archéologie et à l’Histoire beaucoup plus qu’à la religion, à l’instar des pyramides égyptiennes ou des temples aztèques. Mais ce qui fait la force inquiétante de l’Islam, c’est que les populations musulmanes, extrêmement ignorantes dans leur grande majorité, n’ont pas eu leur Renaissance hellénique, ni leur «Siècle des Lumières», ni leur Révolution française et ont cinq siècles de retard sur les Occidentaux. En fait, les intolérances que nous reprochons aujourd’hui aux islamistes sont analogues à celles du catholicisme médiéval et de l’Inquisition, qui brûlait les hérétiques ainsi que les guérisseuses accusées de sorcellerie. Les musulmans ne sont sans doute pas plus sots que d’autres. Leur drame, c’est d’être anachroniques.

 

20)  Le «printemps arabe» qui a débuté en 2010 a soulevé une grande espérance dans les nations musulmanes et dans le monde entier. Il pourrait permettre aux jeunes générations de ces pays d’effectuer un bond en avant culturel et philosophique les mettant à l’unisson des autres peuples. Mais les extrémistes religieux s’efforcent de récupérer à leur profit ce grand réveil et d’enfermer ses protagonistes dans une nouvelle camisole idéologique qui serait pour le monde arabe un véritable suicide intellectuel et moral. Si les islamistes réactionnaires parvenaient à leurs fins, la paix du monde serait en danger, car le choc des civilisations deviendrait inévitable. Que peuvent faire les Européens pour écarter ce risque ? Certainement pas se claquemurer dans les casemates d’un judéo-christianisme exsangue et moribond,  une sorte de «ligne Maginot» religieuse vouée à l’échec et que les islamistes pourraient d’ailleurs transformer en «cheval de Troie» à leur bénéfice, ce qui est évident quand on constate que les associations chrétiennes aident les immigrés clandestins musulmans à s’installer dans les pays européens au mépris des lois nationales.

 

21)  Sous prétexte d’œcuménisme, d’humanisme et d’universalisme, l’Église romaine est toute prête à trahir l’Europe. Il va sans dire que le droit de vote accordé aux étrangers non européens que nous promettent les démagogues socialistes serait également ruineux pour notre identité. Les Européens, et notamment les Français, ne pourront assurer leur avenir que de trois manières : a) en rejetant ensemble les trois monothéismes rétrogrades à la fois rivaux et complices (ce qui n’exclut nullement la protection des minorités chrétiennes persécutées en pays musulman) et en guidant les jeunes générations arabes de tous pays vers la liberté de pensée et l’esprit démocratique, b) en fortifiant la laïcité et en ne tolérant aucune immixtion religieuse, notamment vestimentaire, dans la sphère civile et publique, avec expulsion immédiate de tout prédicateur de la charia, incompatible avec la République, c) en stoppant net toute immigration étrangère non européenne et en n’accordant la citoyenneté qu’aux immigrés présents qui auront donné des preuves de leur adhésion aux lois et aux valeurs républicaines ainsi qu’à l’Histoire et à la culture françaises placées au-dessus de toute dogmatique religieuse. Faute de quoi une guerre civile interethnique ensanglanterait fatalement l’Europe au cours des trente années qui viennent.

 

Pierre LANCE

29 septembre 2012

 

 

Auteur d’une vingtaine d’ouvrages, Pierre Lance a publié notamment : Alésia, un choc de civilisations (Presses de Valmy) et Le Fils de Zarathoustra (Editions Véga/Trédaniel). Il dirige depuis plus de 30 ans la revue de prospective sociopolitique L’Ere nouvelle.

 

Source : http://www.enquete-debat.fr/archives/la-guerre-civile-en-...

 

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Hélios sur son quadrige / Troie / musée de Berlin

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04/03/2013

Les idées difficiles d'Ezra Pound

Les idées difficiles d'Ezra Pound. 

 

Son engagement aux côtés de l'Italie fasciste a été généralement mal compris. Il lui valut d'être enfermé, après la guerre, dans une cage de fer, à Pise, puis interné dans un hôpital psychiatrique, aux États-Unis. C'est de cette époque tragique que datent peut-être ses Cantos les plus émouvants, qui énoncent, pétris de pudeur, notre incomplétude radicale affleurant sous la tragédie de l’histoire.

 

 "L'unique possibilité de sortir victorieux du lavage de cerveau, c'est d'affirmer le droit que détient tout homme à ce que ses idées soient jugées une à une." (Ezra Pound)

 

Ezra Pound, grand parmi les grands de la littérature contemporaine, serait célébré comme tel s'il ne s'était laissé piéger par le démon de la politique, généreux en aléas malheureux. "Si un homme n'est pas prêt à affronter un risque quelconque pour ses opinions, ou bien ses opinions ne valent rien, ou bien c'est lui qui ne vaut rien" (01). Pound a été honnête. Avec ses idées. Et avec son destin.

 

Comme c'est la règle pour tous les personnages qui suscitent la polémique, les lecteurs de s'approchent de son œuvre armés de leurs propres préjugés et prétendent l'enfermer dans ce carcan. Les fascistes le lisent pour y chercher une doctrine qui sied à leurs étendards, doctrine qui ne se trouvera nulle part dans les écrits du poète américain. Les anti-fascistes le lisent pour y trouver les preuves qui justifieraient le crime qu'ils commirent sur sa personne. Comme si émettre des idées était passible de poursuites judiciaires. Ni les uns ni les autres ne pourront prétendre découvrir le vrai Pound, celui qui est réellement intéressant : ce Pound inclassable, toujours actif et "prêt à être passé par les armes avant d'acquitter quelque forme d'impôt que ce soit" (02). Infatigable chercheur de nouvelles formes d'expression, paladin des poètes ignorés qui, demain, seront exaltés, cet être de génie fut, tout au long de sa vie, obsédé par l'influence de plus en plus prégnante qu'exerce l'économie sur la vie moderne.

 

Le poète et l'économie.

 

Tout débuta quand Pound avait 15 ans. À cet âge déjà, il avait décidé qu'à 30 ans, il devait  "connaître, dans le champ de la poésie, plus que tout autre homme vivant" (03). Pour satisfaire cette peu commune ambition, il s'embarqua pour l'Europe en 1906, muni d'une bourse pour étudier l'œuvre de Lope de Vega. Il retournera encore aux États-Unis, mais deux ans plus tard, il dira définitivement adieu à "l’american way of life", à cette Amérique provinciale devenue trop étroite pour lui et où ce qui pouvait avoir la forme d'une aristocratie n'en était en fait qu'une parodie fondée sur la puissance du dollar, où l'art ne pouvait être indépendant de la puissance de l'argent. Le classicisme, Dante et les peintres de la Renaissance le fascinaient. Il demeura deux ans en Angleterre ("où moi, jeune et ignorant, j'étais considéré comme un érudit") (04) et quatre ans en France, deux pays qui le désappointèrent par la léthargie de leurs peuples et de leurs gouvernements. "En 1920, je n'ai rien vu d'autre en Europe que des banquiers sans scrupules, quelques bandes de marchands d'armes et leurs instruments respectifs (des êtres humains)" (05).

 

En 1924, il se rend, avec son épouse l'Anglaise Dorothy Shakespear à Rapallo en Italie mussolinienne. À partir de 1926, le poète fera l'éloge publique de la figure du Duce. Ezra Pound n'est nullement fasciste tout en ne cessant de l'être. Il n'est pas antisémite mais ne cesse de l'être également. S'il écrivit textes ou poèmes en faveur de Mussolini ou d'Hitler, jamais il ne milita au Parti Fasciste ni entretint des relations suivies avec ses instances ; jamais il n'en obtint la moindre faveur et ne se considéra pas un seul instant comme personnellement hostile aux États-Unis, sa patrie.

 

S'il écrivit contre l'influence juive dans l'économie moderne, il cultiva aussi des amitiés sincères avec des juifs, dédicaçant son célèbre Guide to Kulchur à "Louis Zukofsky, lutteur dans le désert". Pound reste rétif à toute classification mais, dans sa vie, ne ressentit jamais la moindre crainte de se compromettre constamment et systématiquement.

"Se compromettre comme peu d'hommes peuvent se le permettre pour la simple raison qu'en le faisant, ils pourraient mettre en péril leurs revenus financiers ou leur prestige ou encore leur position sociale en l'un ou l'autre milieu" (06).

 

Si les détails de son emprisonnement et les mesures répressives qu'il a subies sont relativement bien connus, en revanche, peu d'auteurs se sont penchés sur les théories économiques énoncées par Pound. On les tient généralement pour marginales, insignifiantes. Cette omission donne involontairement une image tronquée de la personnalité du poète, le convertissant chaque fois en un personnage fictif correspondant aux desiderata de ses observateurs. Nous-mêmes, avouons-le, n'aurions pu connaître quoi que ce soit d'objectif sur ses théories économiques, si quelques éditions pirate italiennes ne nous en avaient révélé les arcanes. Pound lui-même (et il est le témoin privilégié !) a déclaré que le thème de l'économie a revêtu une importance toute spéciale durant sa vie entière et plus particulièrement durant la seconde moitié de celle-ci.

 

Pound fonde ses conceptions en économie sur les théories de C.H. Douglas et de Silvio Gesell. Le colonel écossais Clifford Hugh Douglas était un économiste autodidacte qui avait imaginé une réforme monétaire baptisée Social Crédit, rejetant à la fois le fascisme, le communisme et le capitalisme libéral. Douglas — que Pound connut personnellement en 1918 — proposait le contrôle public des activités bancaires par un régime de démocratie parlementaire. Quant à l'Allemand S. Gesell, qui fut Ministre des Finances dans la République Socialiste Bavaroise en 1919, il proposait, dans ses œuvres (la principale étant Die natürliche Wirtschaftsordnung, 1910) la restauration de la valeur d’usage au détriment de la valeur d'échange avec, en définitive, une abolition de l'argent. Éluder les préoccupations économiques de Pound, comme l'ont fait plusieurs historiens contemporains, trahit un a priori, une mauvaise foi stupéfiante dans l'approche et l'analyse de l'œuvre de Pound. Alors que l'économie est si présente chez lui, même dans ses poèmes les plus brillants

 

Pour Pound, tout est contaminé par un mal, par le "cancer du monde" qui est l'usure. À ses yeux, le fascisme est un "bistouri capable de l'extirper de la vie des nations" (07). L'autarcie italienne, la politique monétaire de Mussolini sont, selon Pound, des preuves de cette lutte contre l'usure, bien qu'il juge le corporatisme insuffisant et réclame la socialisation du crédit. "Pour autant que j'admire Mussolini et que le régime fasciste ait atteint ses 15 années d'existence, le système d'impôt en Italie reste primitif et les connaissances monétaires du Duce demeurent rudimentaires ; elles sont néanmoins éclairées en comparaison avec les sanglantes et barbares méthodes anglaises" (08).

 

Depuis sa tendre enfance, il eut conscience du fait que le minéral or régissait la destinée du monde : son père dirigeait un bureau gouvernemental d'enregistrement du droit de propriété des mines d'or en train d'être découvertes à Hailey dans l'État d'Idaho. Par la suite, il travailla à l'Hôtel des Monnaies de Philadelphie. Durant son époque londonienne, un manteau lui servait et de vêtement et de couverture (09). En 1914 — son année la plus féconde et la plus brillante en matière de production littéraire — il gagnait 42 livres sterling par an. Sa préoccupation croissante, c'était de cerner les raisons de l'influence de l'économie sur la vie culturelle et politique. Au fur et à mesure que sa pensée se précisait, il se rendait compte de l'importance décisive que le contrôle du capital avait sur le monde moderne. En 1918, il écrit, dans Selection Poems : "J'entame la recherche des causes des guerres pour m'opposer à elles".

 

La guerre et la rareté de l'argent n'étaient pas des produits du hasard. C'est le grand capital, la finance qui les provoquaient afin d'obtenir un meilleur contrôle de la machine économique et d'accroître leurs bénéfices. Son obsession de découvrir les causes des guerres se reflète largement dans Oro e Lavoro. En voici un extrait : "La guerre est le sabotage maximal. C'est la forme la plus atroce du sabotage. Les usuriers provoquent la guerre pour noyer l'abondance, existante ou potentielle. Ils la font pour créer la cherté et la disette. Les usuriers provoquent des guerres pour organiser des monopoles au mieux de leurs intérêts et ainsi obtenir le contrôle du monde. Les usuriers provoquent des guerres pour créer des endettements ; pour ensuite profiter des intérêts et arriver à obtenir les profits qui résultent du changement de valeur de l'unité monétaire".

 

L'usure devient ainsi la matrice des maux qui ravagent l'Occident, car lorsque l'argent acquiert le droit de manipuler la vie des peuples, il n'y a plus de justice sociale. Vouloir comprendre l'amplitude de cette problématique : voilà ce qui motiva Pound à se jeter corps et âme dans les turbulences de la politique, sacrifiant par là sa carrière de poète et s'attirant l'animosité des médias londoniens.

 

Dans ses œuvres générales, comme Guide to Kulchur, ABC of Reading ainsi que dans les volumineux Cantos qui l’occupèrent toute sa vie, la préoccupation pour l'influence de l'argent surgit sans cesse, se mêlant sans apporter aucune solution à des considérations esthétiques, littéraires et personnelles. "L'unique histoire que nous ne trouvons pas dans les rubriques journalistiques est l'histoire de l'usure", écrira-t-il.

 

Le fascisme et la guerre.

 

En s'installant en Italie mussolinienne, Pound croit être arrivé dans un pays où pourraient se concrétiser ses théories économiques et celles de son maître Douglas. Mais porté par une passion naissante pour Lénine puis pour Staline, passion qui s'amenuisera, il lui arrive de penser que la Russie pourrait devenir, elle aussi, un laboratoire pour ses idées. Il ira jusqu'à demander par écrit à un ami, en 1936 : "Comme il n'y a pas moyen de faire entrer ne fût-ce qu'un peu de bon sens dans la tête des communistes hors de Russie, y aurait-il une manière de faire admettre à une quelconque intelligence ruuusse (sic) de prendre en considération Douglas et Gesell ? Principalement Douglas dont les projets correspondent à une phase du communisme idéale pour les pays dont le développement technique est supérieur a celui de la Russie" (10).

 

Pour ce qui concerne l'Amérique, Pound préférera se rappeler Thomas Jefferson, opposant cette figure de l'histoire américaine à Roosevelt. Pour le poète, Jefferson est une "figure plus ou moins obscure, un peu par ici, un peu par là (…), le grand maître du coup double" (11).

 

Avec le temps, sa reconnaissance envers Mussolini ira en s'accroissant. Il le rapprochera de Jefferson. Le fruit de ce jumelage sera l'ouvrage de 1935 : Jefferson et/ou Mussolini. Chez le Duce italien, Pound mettra en évidence un génie transcendant le système global du fascisme. Ce qui distingue le plus Mussolini des hommes politiques d'alors, selon Pound, c'est son activisme et sen réalisme. Le chef du fascisme italien agit avec à peine quelques schémas types rigides, pratique une politique "au jour le jour", sans doctrine écrite, sans modèle préconçu. C'est pour cette raison que Pound préférera la révolution fasciste, inexportable, à révolution soviétique et à ses artifices (12). Avec réalisme, le poète réactualisera Thomas Jefferson pour qui "le meilleur gouvernement est celui qui gouverne le moins". Ailleurs, il écrira : "J'insiste sur l'identité de notre révolution américaine de 1776 et votre révolution fasciste. Ce sont là deux chapitres de la même guerre contre l'usure" (13).

 

La guerre où s'affrontent, depuis décembre 1943, les États-Unis, son pays natal, et l'Italie, qu'il a choisie comme résidence depuis 1924, va être la tragédie de Pound.

Psychologiquement, Pound est la première victime d'une guerre qu'il a toujours désiré éviter, une guerre qui blesse la bonne foi et la naïveté du poète qu'il est. Déjà dès 1933, il avait tenté de "persuader les personnes les plus intelligentes" d'Italie, de Russie et des États-Unis de rechercher la meilleure entente et la meilleure compréhension possible entre leurs nations. Son cœur restera toujours attache à sa patrie, les États-Unis d'Amérique, dont il défendit le redressement en 1913 (14) mais l'Europe l'avait littéralement "pris aux tripes", captivé à tel point qu'il commençait toujours ses allocutions de Radio Roma par les mots suivants : "Ceci est la voix de l'Europe, Ezra Pound vous parle".

 

Pour lui, la Seconde Guerre mondiale a été provoquée par la tentative européenne d'indépendance par rapport à l'usurocratie tyrannique mondiale dont le siège est à New York. En tant qu'Américain il lui était plus facile de voir les faits sous une forme simple et claire :

 

"Cette guerre n'a pas été un caprice de Mussolini encore moins de Hitler. Cette guerre est un chapitre supplémentaire de la longue tragédie sanguinaire qui commença avec la fondation de la Banque d'Angleterre en cette lointaine année 1694, avec la déclaration d'intention du fameux prospectus de Paterson dans lequel on peut lire : la banque obtient le bénéfice de l'intérêt sur toute la monnaie qu'elle crée de rien" (15).

 

Lors d'une entrevue accordée à Gino Garriotti (16) dans la ville de Rapallo, il donna la réponse qui suit :

 

"L'histoire contemporaine ne s'écrit pas sans comprendre jusqu'à quel point la vie actuelle est viciée par la syphilis du capitalisme, par les nouvelles des journaux et par le contenu des livres imprimés sous des pressions d'intérêts. Pour votre chance, en Italie, vous avez le Duce et le fascisme : le Duce qui, tout dernièrement, a sauvé l'Europe d'un nouveau conflit, noyant les projets des marchands d'armements qui sont les mêmes hommes que les trafiquants d'argent ; mais, dans le reste de l'Europe, les journaux sont aux mains de ces gros manipulateurs".

 

Malgré ces déclarations tonitruantes, l'activité politique de Pound n'a jamais apporté quoi que ce soit de particulier au régime fasciste italien. Les fascistes l'ont toujours considéré comme un excentrique qui, opposé au culte de la Rome antique préconisé par le régime, préférait parler de Confucius. Ses multiples requêtes pour être reçu par Mussolini n'eurent qu'une suite, le 30 janvier 1933, lorsque le poète obtint une audience du Duce et lui remit un exemplaire de ses premiers Cantos (le dictateur lui fit le commentaire suivant : "ceci est divertissant"). Ezra Pound ne fut jamais un fasciste au sens strict du terme, et s'il le fut, c'est à sa manière bien particulière, une manière qui lui était propre. Individualiste, réfractaire à l'étatisme, il parlait de fascisme et de liberté comme d'une seule et même chose :

 

"Ensemble mille bougies produisent une splendeur. La lumière d'aucune de celles-ci n'assombrit celle des autres. Ainsi est la liberté de l'individu dans l'État idéal et fasciste" (17).

 

L'esthétique condamnée : Pound en prison.

 

Quand Pound apprit en 1943 que le Grand Jury du District de Columbia l'avait accusé de trahison, ceci malgré qu'en 1941 les autorités américaines aient refusé les visas de retour du poète et de son épouse, il écrivit au Procureur Général des États-Unis d'Amérique les phrases suivantes :

 

"Je n'ai pas parlé de CETTE guerre, mais bel et bien émis une protestation contre un système qui génère guerre aprés guerre, en série et systématiquement. Je ne me suis pas adressé aux troupes ni leur ai suggéré de se mutiner ou de se rebeller. La base d'un gouvernement démocratique ou de majorité exige que le citoyen soit informé des faits. Je n'ai pas prétendu connaître tous les faits mais bien savoir que certains de ces faits sont une partie essentielle de tout ce qui devrait être porté à la connaissance du peuple".

 

Avec la fin de la Seconde Guerre mondiale, toutes les théories économiques de Pound acquirent une aura de tragique. Aujourd'hui, nous nous souvenons de son emprisonnement, suspendu dans une cage à fauves à un arbre puis reclus dans un hôpital psychiatrique durant plusieurs années.

 

La difficulté à classer Pound fit que certains intellectuels de "gauche" réclamèrent sa réhabilitation. Ces plaidoyers tardifs créent parfois la confusion, comme, par ex., quand un Carlo Scarfoglio pose la question : "Pourquoi faire cadeau d'Ezra Pound aux nazis et aux fascistes ? Un homme qui, sans être communiste ou socialiste dans le sens doctrinaire et politicien, lutte pour libérer l'homme de cette sourde et obscure tyrannie" (18). Scarfoglio oubliait où Pound avait préféré lutter pour cette liberté. Et quand il posait sa question, le poète payait encore son "péché" dans un asile psychiatrique américain.

 

Combien sonnent paradoxales ces paroles quand on sait que Pound écrivait, bien avant les événements, dans son Guide to Kulchur : "Ce qui compte en dernière instance est le niveau de civilisation. Aucun homme décent ne torture des prisonniers". Il ne pouvait imaginer que dix ans plus tard lui-même allait être le plus remarquable des hommes capables de donner décence à notre civilisation.

 

Ezra Pound a été l'alchimiste qui unissait esthétique et éthique. La qualité de son œuvre poétique est indubitable. Les Cantos sont le poème épique le plus profond de la littérature moderne (on l'a même comparé en importance à la Divine Comédie et à Faust) ; ils sont le fruit de 54 ans de travail et d'une vie consacrée à la recherche désespérée d'une pureté absolue de formes et de contenu. Avec les Cantos, son chef-d'œuvre, le vieux poète nous laissait une ironie amère et vengeresse :

 

"Je suis certain que dans mille ans le monde lira mes poèmes et se posera la question : qui étaient ce Staline et ce Roosevelt que Pound attaquait avec une telle férocité ?"

 

Manuel Domingo & José Manuel InfiestaVouloir n°25-26, 1986. 

(Traduction française : Rogelio Pete)

Source > http://vouloir.hautetfort.com/archive/2007/06/09/pound.html

  

ezra pound 

NOTES :

01. Déclarations de Pound en 1945, citées par G. Singh in Ezra Pound. Florence. 1979, p.10.

02. Canto LXV, Cantos Complets, Mexico, 1972.

03. How I began. 1913.

04. Comment lire et pourquoi ?

05. Jefferson et/ou Mussolini, 1935.

06. Guide to Kulchur, 1938.

07. À quoi sert l'argent ? in Greater Britain Publications, 1939.

08. Guide to Kulchur, 1938.

09. Michael Reck. Ezra Pound. Barcelone, 1976.

10. Lettre à John Courtos, 25 sept. 1936.

11. Data line in Make It New, 1934.

12. Jefferson et/ou Mussolini, op cit. « Une idée fixe est une idée morte, immobile, rigide, laquée, sans fondement. Les idées des génies ou des hommes sagaces sont organiques et germinales, elles sont la semence des écrits. »

13. Carta da visita, 1942.

14. Ma Patrie, 1913.

15. Travail et Usure, Lausanne, 1968.

16. Propos recueilli par René Palacios, Escrito en Rapallo, Madrid, 1982.

17. Carta da visita, op, cit.

18. Carlo Scarfoglio. Il caso E. Pound in Paese Sera, 16.06.1954.

193. Bien que, comme l'a signalé Piero Rebora, ce ne soit pas une poésie pour tous, il faut y être préparé (in Ezra Pound : Canti Pisani, article paru dans L'Italia che scrive en janvier 1954). 

22/02/2013

Patriotisme Européen, par Marcel Déat.

Patriotisme Européen

Marcel Déat

 

Extraits  tirés d’un texte (toujours d’actualité !) publié dans « La Jeune Europe ( Revue des combattants de la jeunesse universitaire européenne ) », cahier 3/4, 1942.  

 

Je le dis tout net : si cette guerre ne contenait pas la promesse de l’unité européenne, si ce prodigieux conflit n’était pas en même temps la grande révolution des temps modernes, et si l’Allemagne nationale-socialiste n’était pas à la fois la conductrice et la garante de nos espoirs révolutionnaires, je ne vois pas pourquoi je serais « collaborationniste ». Sinon pour combiner, vaille que vaille, un sauvetage français, sous le signe de « l’égoïsme sacré », quitte à poignarder dans le dos mon partenaire, si l’occasion venait à s’offrir.

Et quiconque n’est pas socialiste autant que national, européen autant que français, doit en effet s’établir sur ces positions et ne plus en bouger. C’est bien ce que nous constatons, depuis un an, quels que soient les discours. Je ne crois pas qu’il y ait désormais une confusion possible entre cette attitude et la nôtre. Et je me suis permis d’indiquer que les conséquences, pour la patrie, étaient autrement fécondes, autrement riches, si l’on consentait enfin à se jeter, corps et âme, dans la bataille européenne, et sans regarder derrière soi.

Mais l’incompréhension engendre trop facilement la calomnie, et la sottise est trop près du dénigrement, pour que nous n’éclairions pas en plein certaines idées. On a assez accusé de chimère le vieux socialisme, quand il évoquait l’Europe, quand il s’enivrait d’universalisme, pour qu’on ne manque pas de reprocher au nouveau socialisme un identique irréalisme. Comme si, selon la juste remarque de Jacques Chardonne, l’Allemagne d’aujourd’hui n’était pas merveilleusement différente de celle d’avant-hier.

Comme si le rassemblement des révolutionnaires européens avait désormais à voir avec les palabres des congrès internationaux.

Il ne s’agit plus de prononcer des discours solennels, de pontifier sur des tribunes, d’ergoter sur des résolutions, de formuler des dogmes avec l’autorité qui s’attache aux conciles. Il s’agit de combattre, d’abord, et ensuite de bâtir. De combattre les armes à la main, sur d’immenses champs de bataille, avec le risque que cela comporte. De combattre aussi dans les bagarres civiques, d’y risquer pareillement sa vie, et bien plus encore, sa tranquillité, sa réputation, son pain, son honneur. Et ce ne sera pas trop de tous ces sacrifices pour aider à l’accouchement d’un monde.

Fort bien, diront nos sages. Mais pourquoi cette fuite vers l’Europe, alors que la patrie est pantelante et requiert l’effort de tous ?

Mais qui parle de fuite ? Et qu’est-ce donc que l’Europe, sinon l’ensemble des patries ? Et où veut-on que nous servions l’Europe, sinon chez nous, sinon en France, sinon par la France et pour la France ? Il n’y a pas une terre européennne, indivise et neutre, où nous puissions planter indifféremment notre tente. Il y a une France, qui est en Europe, qui est un élément nécessaire de l’Europe. Et les deux réalités ne se séparent point.

Ce qui est vrai, c’est qu’en effet nous refusons « l’égoïsme sacré ». Que nous n’acceptons pas le refrain maurrassien sur « la France, la France seule ». Parce que cela n’a pas de sens, ou bien signifie qu’on se dresse contre l’unité continentale, qu’on la refuse, et que, sournoisement, on espère retrouver, au delà des mers, les anglo-saxons et leur capitalisme. Car, il faut bien rire, nos super-patriotes, qui repoussent si noblement l’impur contact germanique, ont la passion d’être à nouveau asservis aux seigneurs de la City et de Wall Street.

Et bien ! oui, nous commençons à avoir un patriotisme européen, une sensibilité européenne.

(…)

L’expérience a prouvé qu’une bigarrure de nations théoriquement assemblées à Genêve ne faisait pas une Europe. Il n’y a d’unité que dans une solidarité totale de la vie matérielle, et dans la similitude essentielle des institutions. La guerre, la révolution, sont en train de brasser les peuples et d’unifier les tendances, de rendre convergentes les aspirations politiques et sociales. Et c’est une triste chimère que d’espérer une unité française en dehors de ce passage au creuset de la révolution.

Qu’on nous laisse tranquille avec les propos abstraits et les poncifs officiels sur l’unité française : il y a une réalité française que rien n’entamera. (…) Il y a un trésor français que l’histoire nous lègue et qui jamais ne sera perdu. Mais la France dont l’Europe à besoin, la France sans laquelle il n’y aura plus vraiment de nation française, doit avoir une autre température, elle doit brûler d’une autre flamme. Un certain patriotisme d’image d’Epinal ne la gardera pas des effritements et des affaissements internes. Et si une grande passion ne la saisit pas, si une ardente mystique collective ne s’empare pas d’elle, ne la porte pas vers son vrai destin, il ne lui restera que la force misérable et désordonnée qui se disperse et s’épuise en déchirements.

Je prie pour que nos politique y songent : l’élan vers l’Europe sauvera la France de plus d’une manière, même en l’arrachant à ce qu’elle prend orgueilleusement pour une solitude, à un narcissisme ridicule et désespéré, à un radotage de vieillards au coin du feu. La révolution fait l’Europe, la révolution refait la France, la révolution concilie l’Europe et la France.

 

Marcel Déat / 1942. 

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Quelques exemplaires de « La Jeune Europe », retrouvés en faisant un peu de rangement.  

Une véritable mine d’excellents textes, tous très rares… dont nous vous offrirons régulièrement quelques pépites, le temps pour nous de les relire, trier et (surtout) taper.

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